À en croire Samy Chandiramani, qui rejoint Saya onze ans plus tard en tant que business developer, cette énergie-là est restée. « Pour moi, c’était une bande de jeunes qui se marraient mais qui avaient eu le courage de se lancer dans cette aventure, de prendre ce risque-là. Aujourd’hui ce tempérament est encore présent. Julien embauche et fait des travaux en temps de crise. On ne fait pas les choses comme tout le monde. On ne veut pas faire les choses comme tout le monde. »
Pour Pascal Blondela, chargé de plannings et de suivi de postproduction, ces prises de risque sont la preuve d’« une vision d’entrepreneur » et d’« une tenue ». « C’est comme une note qui se tient et qui glisse naturellement grâce à tout le travail qui est mis en œuvre, en bonne intelligence, derrière. »
Lorsque Saya établit ses quartiers dans le Sentier, il y a à ce moment aussi la forte volonté de créer un lieu dans lequel les gens vont se sentir bien. Tout simplement. Si les gens se sentent bien ici, tout ce qui en sortira ne sera que meilleur. Leur chance se situe entre ces murs du numéro 32 de la rue des Jeûneurs. Il s’agit d’un ancien atelier textile parisien ayant gardé ses allures industrielles et dont le charme opère encore sur tout nouveau visiteur.
Une histoire en son et image
La postproduction son devient vite le cœur de métier de Saya. Mais ça ne suffira pas. À ce moment, les chaînes de télé sont dans une logique de moindres coûts et d’industrialisation. Elles cherchent à tout postproduire au même endroit par souci de cohérence, aussi. Pour répondre à ces nouvelles attentes, Saya se généralise à l’ensemble de la postproduction.
Avec l’aide d’un quatrième associé, François-Charles Le Goff, et de nombreux investissements, l’équipe s’agrandit et développe la partie image. C’est là que Saya fait ses premiers pas dans l’univers de la série : Section de Recherches produit par Dominique Lancelot et L’Hôpital produit par Antoine Perset, puis d’autres comme Les Invincibles par Making Prod (avec Stéphane Drouet et Matthieu Viala) ou encore Pigalle, la nuit par Lincoln TV.
Mais qui dit autant d’investissements en si peu de temps, dit aussi pas mal de dégâts lorsque la crise de 2008 frappe leur secteur quelques années plus tard… Heureusement, les choses repartent assez vite et l’équipe décide de concentrer ses efforts sur la fiction et le documentaire. Il y a eu entre temps, l’opportunité de travailler sur quelques longs-métrages, notamment Mirors réalisé par Alexandre Aja et monté par Baxter. Mais pour servir leur volonté d’intervenir sur un maximum d’étapes de la postproduction, l’équipe a décidé de faire du petit écran son terrain de jeu.
C’est dans cette optique que Saya développe tout une gamme de services, en plus de Saya Sound et Saya Lab, dédiés à la postproduction son et image. « Le but de ces nouveaux services était notamment d’accompagner les clients sur les différents avantages, mais aussi sur les contraintes très spécifiques qu’apporte le numérique », précise Julien.
« Saya Heritage et Saya Protect, par exemple, répondent respectivement aux contraintes de sauvegarde et de protection contre le piratage, tandis que Saya Play facilite l’accès aux images et permet aux équipes de les travailler de façon collaborative. On propose également Saya Anywhere à des clients qui, pour des raisons techniques, travaillent dans d’autres studios mais veulent profiter de notre service même à distance. »
Mais comme l’explique Samy : « Saya se refuse de tout faire. Lorsque l’expertise n’est pas chez nous, on s’associe avec des partenaires de qualité. C’est le cas pour Saya Full Access, par exemple, servant à toute la partie sous-titrage et audiodescription. »
L’artisanat au cœur
Au-delà de la volonté d’être identifié comme un réel prestataire de services capable d’intervenir sur toutes les phases de la postproduction, il y a derrière le fait de se concentrer sur la fiction française, l’envie de participer à sa montée en gamme. Pour Julien, « travailler sur Les Invincibles, c’est participer au projet d’une chaîne comme Arte : diffuser une série grand public. C’est participer à ce que le grand public ait lui aussi accès à du contenu de qualité. Et ça, en tant qu’“ultra techniciens”, ça nous plaît. On tient à ce que la qualité du produit fini soit optimale et ce, quel que soit le client. » « Ou le projet », ajoute Clément Chaumeil, directeur technique son.
« Qu’on soit sur du flux, de la série prestige ou du long-métrage, pour moi, l’objectif est le même : faire en sorte que les artisans travaillant chez nous soient dans les meilleures conditions, libérés de toute préoccupation d’usage, de technique, pour qu’ils n’aient à se concentrer que sur leur véritable métier. »
Et ce n’est pas son homologue sur la partie image, Florentin Genot, qui dira le contraire : « Les gens qu’on côtoie au quotidien ne sont que des passionnés : ils sont là pour faire leur métier. Étant nous-mêmes passionnés, on ne peut que faire tout ce qui est en notre possible pour leur offrir les meilleures conditions de travail. »
L’équipe ne lésine donc pas sur les moyens. « Dans les boîtes où j’ai travaillé jusque-là, l’idée était de dépenser le moins possible pour arriver à un certain résultat. Ici, le paradigme est différent. On investit où il faut et tant que nécessaire, pour garantir les meilleurs résultats sur les trois à cinq prochaines années. Notre travail de veille en ce sens est primordial. Si on choisit d’équiper les derniers audis en Atmos, c’est parce qu’on sait que dans quelques années ce sera la norme », explique Clément. « Le fait d’être allé chercher cette qualité rend compte de là où on veut emmener Saya », ajoute Pascal.
« L’idée de Saya est de respecter et de valoriser le métier, tous les corps de métier de la postproduction. Tous les investissements qui ont été faits depuis le début vont dans ce sens. Si on est sur des environnements Avid ce n’est pas un hasard. Parce que la qualité technique est là, bien sûr mais au-delà de ça, ils ont une compréhension hyper fine des métiers de la postproduction. Quand on voit la liberté qu’offre à un monteur un environnement comme Media Composer, on comprend que l’outil a vraiment été pensé pour lui. »
« Ce sont des outils de création. Et on ne veut pas offrir moins que ça aux créateurs présents chez nous », ajoute Clément. « Ce sont également des outils nous ayant prouvé qu’on pouvait leur accorder toute notre confiance. Et ça, c’est en grande partie grâce à Videlio-Cap’Ciné. Ils ont une connaissance parfaite de l’environnement Avid et on a créé une telle relation de confiance avec eux depuis toutes ces années, que si on a le moindre pépin technique, on sait qu’il sera réglé dans la demi-journée. Avid, Videlio-Cap’Ciné et Saya forment un trio qui fonctionne et qui nous permet à nous, qui sommes au service des créateurs, de nous concentrer sur l’essentiel de notre métier, à savoir l’accompagnement humain », précise Florentin.
L’équipe de tous les possibles
Accompagner au mieux les gens travaillant chez Saya, c’est finalement répondre à cette idée de départ. Celle de faire en sorte qu’ici les gens se sentent bien. Une idée simple et universelle dont personne n’a la recette mais que l’équipe de Saya semble honorer. « Entre nous, ce qu’on se dit souvent, c’est qu’on n’est pas loin de l’hôtellerie de luxe », explique Pascal.
« L’objectif est d’avoir le service le plus qualitatif, l’accueil le plus agréable. » « Et d’être le plus disponible », surenchérit Florentin. « Chacun, depuis la place qui est légitimement la sienne, ira jusqu’au maximum de ses possibilités pour répondre à la demande d’un client. »
« Aujourd’hui, le fait que les budgets des séries aient tendance à diminuer, notamment chez les diffuseurs traditionnels, c’est pour nous un challenge supplémentaire nous poussant à réfléchir autrement, à développer notre expertise en amont de la postproduction pour chercher à optimiser le budget par exemple. Quelle que soit la tendance du marché demain, on cherchera toujours la solution la plus intelligente pour offrir au moins la même qualité de prestation », explique Julien.
Pour Samy, cela ne fait aucun doute : « La vraie valeur ajoutée de Saya, c’est cette équipe. C’est elle qui fait que tout est possible, autant pour nous que pour nos clients. Ce sont des experts, comme il y en a dans les grands groupes, certes, sauf qu’eux ont une telle passion pour leur métier, une telle envie de satisfaire le client qu’ils font preuve de la plus grande curiosité pour anticiper les demandes futures et du plus grand dévouement pour trouver dans l’instant, non pas la solution la plus évidente, mais bien la meilleure solution qui soit. C’est avec cette idée que nos clients repartent de chez nous et c’est pour ça qu’ils reviennent. Notre volonté c’est de redonner ses lettres de noblesse au métier de prestataire de service et je pense que c’est palpable. »
Une énergie impulsée et inspirée par un management qu’on pourrait résumer, à en croire l’équipe, de « toujours exigeant, toujours bienveillant ». « La seule chose qui importe ici, c’est la confiance qu’on s’accorde mutuellement. Peu importe l’âge ou l’expérience, cette confiance-là ne se gagne qu’en faisant la preuve de son travail et nous avons toute la liberté et l’autonomie pour le faire », explique Clément, ravi d’avoir trouvé un environnement dans lequel il est possible de se voir donner la chance de devenir directeur technique, même à 25 ans.
Et demain ? La qualité, toujours
« Aujourd’hui ma seule ambition c’est de continuer à progresser dans la qualité de notre accompagnement, de notre expertise, de nos services. Pas dans la quantité. Saya n’a pas vocation à grandir en nombre. Je tiens à la taille qu’on a aujourd’hui parce que c’est celle qui nous permet d’avoir une relation si spéciale avec les gens qui travaillent chez nous », explique Julien.
« Et si cette volonté de maintenir ce niveau de qualité, nous fait paraître comme un prestataire plus onéreux, je l’accepte. Je fais confiance au temps. Il nous a montré qu’on arrivait à convaincre ceux qui voulaient bien sortir de leurs grilles tarifaires pour venir nous voir. »
« Les clients qui ne cherchent pas de la prestation au rabais, ceux qui cherchent de la véritable prestation de service dans le but de faire eux-mêmes un travail de qualité, ceux-là repartent convaincus », ajoute Fatiha Sabri, responsable administrative et comptable.
« C’est cette attache sincère à la qualité qui explique, je pense, notre chance d’avoir une clientèle si fidèle dans un milieu assez volatile. Une chance que l’on veut continuer à honorer », estime Julien.
L’INFRASTRUCTURE SAYA
- Côté image
– Douze salles de montage images Avid MediaComposer 2020.12 ;
– Une salle d’étalonnage 4K/HDR DaVinci Resolve Studio 17 ;
– Un système de stockage centralisé Avid Nexis E2 (20TB) / PRO (80TB) ;
– Des espaces conformation et vérification.
- Côté son
– Neuf salles de montage son dont deux en LCR, 3 en 5.1, et trois en Atmos 7.1.4 ;
– Un audi de mixage TV 5.1 avec cabine speak ;
– Deux audis de mixage TV home Atmos 7.1.4 ;
– Deux audis de mixage ciné/TV home Atmos 9.1.4 adaptés pour les enregistrements post-synchro.
Tous les audis de mixage sont équipés de consoles Avid S6 ou D-control et de systèmes d’écoute cinéma DK Audio.
Article paru pour la première fois dans Mediakwest #41, p. 82-86. Abonnez-vous à Mediakwest (5 numéros/an + 1 Hors série « Guide du tournage) pour accéder, dès leur sortie, à nos articles dans leur intégralité.