« Notre groupe réunit une expertise et une expérience uniques, qui lui permettent de maîtriser l’intégralité de la chaîne de valeur, de la création des images à leur diffusion. Une part importante de notre activité consiste à couvrir de grandes rencontres sportives », explique Bevan Gibson, CTO d’EMG, qui développe ensuite son propos.
“Les programmes sportifs ont toujours été le moteur du développement de nouvelles solutions technologiques : en effet, les spectateurs demandent sans cesse plus de caméras, plus d’angles, plus de ralentis, plus de graphismes et une meilleure résolution (4K ou HDR UHD, par exemple). Afin de garder une longueur d’avance, nous mettons constamment au point des solutions apportant une valeur ajoutée tout en permettant des économies d’argent et de main-d’œuvre. L’un des moyens par lesquels nous parvenons à cette fin, c’est le recours aux réseaux IP pour centraliser le contrôle et faciliter l’accès à distance.
C’est ainsi que nous avons créé un nouveau fly-pack entièrement basé sur IP, baptisé diPloy. Ce système de production entièrement modulaire prend la forme de racks de différentes tailles dans des conteneurs standard de douze mètres, ce qui nous permet de préparer des fonctionnalités spécifiques en fonction de chaque événement. Les modules tiennent dans un flight case et peuvent donc être placés là où ils sont nécessaires : certains à proximité de l’action et d’autres à une bonne distance.
L’un des premiers déploiements majeurs du système diPloy a été la couverture d’une grande rencontre multisports organisée au Japon à l’été 2021. Pour cet événement, la chaîne qui allait diffuser les images, nous a confié la responsabilité de la majeure partie de l’infrastructure technique nécessaire.
Le stade où se tenaient la plupart des épreuves d’athlétisme accueillait également les cérémonies d’ouverture et de clôture. Pour répondre aux besoins de la chaîne et assurer une redondance complète du système lors de la cérémonie d’ouverture, nous avons créé huit galeries de contrôle situées dans des locaux techniques à cinq cents mètres du stade.
Le premier de ces besoins était de transmettre le signal des caméras et micros du stade vers les régies. Pour cela, un rack diPloy a été installé à l’intérieur du stade afin de centraliser les signaux capturés. Une liaison par fibre optique envoyait alors des données IP non compressées vers les locaux techniques, où les images étaient alors rendues disponibles pour la production.
Les caméras principales étaient en 4K HDR UHD, tandis que certaines caméras de terrain filmaient dans d’autres résolutions. Les liaisons utilisaient quant à elles le protocole IP, mais les racks diPloy acceptaient également le format SDI. Dans la régie, la majorité du travail était également réalisée en IP ; nous avons cependant utilisé les serveurs de replay existants, qui étaient en SDI et nécessitaient donc une conversion en IP SMPTE ST 2110.”
diPloy, un système à toute épreuve
Un élément essentiel de diPloy est le SNP (Selenio Network Processor), mis au point par Imagine Communications. Puissant et compact, le SNP est un appareil utilisant des outils logiciels pour assurer une large gamme de fonctions. Chaque SNP occupe 1 U et est équipé de quatre processeurs indépendants, chacun ayant huit chemins de traitement 3G possédant une « personnalité » logicielle propre, prête à n’importe quel usage.
Il peut s’agir, par exemple, d’une conversion SDI-IP, d’un changement de résolution, de format ou d’espace de couleurs, de traitements vidéo ou audio, de prise en charge de multiviewers et bien plus encore. Le SNP fournit l’interface pour les connexions IP à haute vitesse entre différentes unités, soit jusqu’à 400 Gb/s par fibre optique sous sa version actuelle.
À mesure que le secteur se tourne vers des résolutions de plus en plus élevées, les chaînes européennes cherchent des moyens d’adopter plus largement la 4K et la HDR tandis que les chaînes américaines sont plus orientées vers la HD 1080p en HDR. Le SNP est capable d’effectuer les conversions correspondantes, ce qui nous permet d’offrir différentes images pour différentes destinations, en toute simplicité et transparence. Il suffit d’un clic pour changer les opérations de chaque chemin de traitement au sein du SNP. Cette combinaison de puissance et de flexibilité est idéale pour nous et nous considérons cet outil comme le véritable cœur de diPloy.
Cet été, à Tokyo, ce sont des SNP qui ont assuré la conversion et le multiplexage des signaux d’entrée avant de les transmettre à la régie, où d’autres SNP les ont séparés en vue de la production. Le processus est entièrement transparent, avec une latence virtuellement nulle. Du point de vue des équipes techniques, c’était comme si des caméras SDI étaient branchées directement à leur poste de travail. Il aurait été très inefficient d’installer huit galeries dans le stade où n’étaient organisées que certaines épreuves de ce grand événement multisports ; c’est pourquoi nous avons fait appel à d’autres racks diPloy – encore une fois équipés de SNP – pour couvrir les épreuves qui se tenaient ailleurs, la production étant quant à elle centralisée à proximité du stade.
Pour le cyclisme sur route, par exemple, les images ont dû parcourir plus de cent kilomètres vers le local technique du stade où elles ont été montées et mixées. Les SNP installés dans les racks diPloy multiplexaient alors tous les signaux pour ne former qu’une seule liaison IP à haute vitesse.
Pour la couverture de la course cycliste, il a également été fait appel à des caméras embarquées sur des motos, des hélicoptères et même des avions : des récepteurs sans-fil ont donc été installés aux endroits propices et, lorsque c’était nécessaire, d’autres SNP ont été utilisés pour assurer la liaison avec la régie. La latence induite par la conversion, le multiplexage et la transmission du signal vers le mélangeur de production était si faible que le réalisateur ne l’a même pas remarquée.
L’avenir de diPloy
Cet événement nous a permis de démontrer, de manière très publique, l’efficacité de la solution diPloy pour ce qui est de séparer la source des images et les ressources de production. Il y a là un grand potentiel pour la couverture de rencontres sportives, même en dehors du cycle de quatre ans des grands événements internationaux. Nous avons déjà installé diPloy dans une nouvelle régie créée dans nos installations aux Pays-Bas, et nous travaillons sur des projets semblables dans plusieurs grandes villes européennes. L’objectif global est de centraliser les opérations de production, ce qui permettra de réduire à la fois les dépenses et l’impact environnemental.
En une semaine, un car-régie traditionnel peut assurer la couverture de trois matchs de football par semaine dans un périmètre limité ; une régie diPloy, en revanche, pourrait prendre en charge trois matchs en une seule journée, simplement en centralisant les images envoyées par l’équipement de tournage sur place.
Le lieu où les matchs se déroulent n’est plus un facteur limitant. Une seule équipe de production et un seul réalisateur pourraient couvrir, par exemple, deux matchs de ligue 1 en une journée de travail : une rencontre l’après-midi à Manchester, puis une le soir à Prague. Un réalisateur pourrait même travailler avec un mélangeur de production dans un studio tchèque, tandis que l’équipe de montage et de replay serait à Amsterdam et le responsable du son à Londres.
C’est ici que diPloy apporte une réponse aux difficultés de la production à distance de programmes sportifs. Par exemple, un samedi d’hiver à 15 heures, il pourrait y avoir plusieurs matchs de football et de rugby en même temps, ce qui engendre une pression importante sur le nombre limité de cars-régies disponibles. En répartissant la charge entre plusieurs installations de production centralisée, on peut non seulement assurer tous les besoins de couverture pour le football et le rugby, mais même ajouter le hockey et le handball.
Sans diPloy, l’équipement passerait le plus clair de son temps éteint, stocké dans un car-régie parcourant les autoroutes d’Europe pour aller sans cesse d’un stade à l’autre. Avec diPloy, des studios de production performants peuvent être installés à faible coût, permettant ainsi aux chaînes de proposer des programmes sportifs plus spécialisés.
Nous pouvons également créer des studios de production plus confortables à installer dans un car-régie, avec une place suffisante pour que l’équipe de production puisse se détendre entre deux rencontres. En consacrant plus de temps à la dimension créative de leur travail et moins de temps à voyager, les membres de l’équipe sont également plus épanouis. On peut souligner de plus que, puisqu’il y a maintenant moins de personnes et de matériel à déplacer, le système donne lieu à moins d’émissions de carbone.
En ce qui concerne le SNP, nous avons une excellente relation de travail avec Imagine Communications. C’est agréable de travailler avec un fournisseur qui est attentif à notre activité et à nos besoins, et qui les prend en considération. Nous attendons avec impatience l’implémentation de JPEG XS dans le SNP, car cela nous permettra de transmettre encore plus de signaux par une liaison en fibre optique, avec une latence minimale. Le SNP représente un élément essentiel de notre architecture diPloy : c’est un couteau suisse de la production, si l’on veut, offrant différentes « personnalités » dans un châssis de 1 U. Et nous sommes certains que diPloy représente l’avenir des programmes sportifs en direct.
Article paru pour la première fois dans Mediakwest #45, p. 98-100