Studio 100 Animation : la VR rouage clé du pipeline d’animation

La VR est en passe de devenir un élément important du pipeline de production en animation. Aussi, les retours d’expérience sont-ils aussi nécessaires que précieux. Rencontre avec l’équipe de Studio 100 Animation : Jean-François Ramos, Quentin Auger et Jérôme Mouscadet.
2_1_Visuel_studio_05.jpg

 

Mediakwest : La réalité virtuelle nécessite-t-elle une forte R&D ?

Quentin Auger : Oui, surtout lorsque l’on veut l’intégrer à un pipeline plus global. Notre équipe R&D (trois personnes sur six) y consacre beaucoup de temps. Nous travaillons également avec Unity3D et des chercheurs de l’Inria (Institut national de recherche dédié aux sciences du numérique) pour développer des outils de production temps réel. Comme la réalité virtuelle nécessite beaucoup de développements, nous proposons notre plateau virtuel en prestation. Celui-ci offre, pour un moindre coût, une prestation VR sécurisée et intégrée dans le processus storyboard, animatique et layout 3D.

 

M. : La retopologie constitue-t-elle toujours une limitation ?

Q. A. : Oui ! Elle est nécessaire quand, lors du rigging par exemple, il s’agit d’associer des joints avec des points et organiser correctement les lignes de force. Il existe néanmoins de nouveaux outils de « retopo » qui accélèrent cette étape si les modèles de base ont été sculptés ou scannés sans prendre en compte ces considérations.

 

M. : Jusqu’où l’outil VR peut-il être utilisé ?

Jean-François Ramos : Le fait d’être suivi dans l’espace virtuel offre de nombreuses possibilités. Si l’opérateur porte des capteurs sur son bassin ou ses pieds par exemple, il peut manipuler avec les télécommandes des personnages virtuels en temps réel. Il est aussi possible de suivre une vraie caméra (équipée elle aussi d’un capteur pour être géolocalisée) et de caler en temps réel les prises de vues sur une scène virtuelle. Récemment, nous avons utilisé une caméra synchronisée avec une caméra virtuelle pour travailler des interactions entre des personnages virtuels et réels. Il y a dix ans, cette opération était complexe à réaliser.

 

M. : La réalité virtuelle peut-elle avoir un impact sur la relocalisation ?

J.-F. R. : Il est difficile de se passer de la sous-traitance quand il s’agit d’une série d’animation à fort volume. En France, nous prenons en charge la création jusqu’au layout, puis, lorsque les plans reviennent d’Inde où ils ont été animés et rendus, nous effectuons la postproduction. La réalité virtuelle nous a permis de sécuriser cette prestation. Rapatrier toutefois toute la fabrication en France n’est pas notre premier objectif, qui est de gagner en qualité. Mais cela pourrait arriver dès que nos process s’accéléreront suffisamment, grâce à ces nouvelles méthodes de production.

 

M. : La réalité virtuelle peut-elle résoudre en partie le problème du recrutement dans les métiers de l’animation 3D ?

Jérôme Mouscadet : Les conditions actuelles (24 mois maximum pour fabriquer 10 heures de film) rendent difficile l’intégration de jeunes dans nos équipes. Le studio digital permet à des storyboarders confirmés de transmettre spontanément leur expertise dans la mise en scène à des opérateurs VR juniors. Le fait d’intégrer la réalité virtuelle constitue également un signal fort auprès des jeunes qui ont beaucoup à nous apprendre car ils ont des intuitions très rapides.

 

M. : La réalité virtuelle va-t-elle avoir des impacts sur les postes ?

J.-F. R. : Il ne s’agit pas de détruire des métiers traditionnels, mais d’apporter de nouveaux outils. Dès que nous avons repéré les départements où la réalité virtuelle peut être efficace, nous proposons aux artistes, s’ils le souhaitent, de l’utiliser temporairement. Nous regardons alors comment ils procèdent et si la réalité virtuelle aboutit à de meilleurs résultats.

 

M. : Studio 100 Animation mène en parallèle une activité de prestation. Allez-vous proposer la réalité virtuelle à vos clients ?

J.-F. R. : Le studio français d’animation de Studio 100 est en effet engagé dans des prestations 2D et 3D, comme les séries Arthur et les Minimoys, Nils Holgersson, Agence galactique… Si elle n’est pas imposée par le donneur d’ordre, nous ne proposons pas la réalité virtuelle.

 

Extrait de l’article paru pour la première fois dans Mediakwest #32, p.88/91. Abonnez-vous à Mediakwest (5 numéros/an + 1 Hors-Série « Guide du tournage ») pour accéder, dès leur sortie, à nos articles dans leur intégralité.


Articles connexes



Virtual Room la VR
 15 janvier 2023