Il est des situations dans lesquelles on aimerait faire des images, car le cadre est grandiose ou l’action palpitante, mais où il n’est pas possible de manipuler une caméra. Je pense, par exemple, à une ascension en alpinisme, quand les deux mains tiennent des piolets comme autant de précieux ancrages dans la glace, mais où les yeux aimeraient capturer la beauté des séracs environnants. C’est pour ces moments que les action cams ont été créées et leur succès n’est pas étonnant.
Étant spécialisée dans la vidéo de sports dits « extrêmes », j’ai eu l’occasion d’utiliser la plupart des modèles du marché, appréciant leurs qualités et défauts. Cette fois, j’ai pu tester deux caméras parmi les plus hauts de gamme pour ce genre de situation, la Sony RX0 et la GoPro Hero 6, dans le cadre magnifique du mont Blanc.
Les deux caméras sont de format similaire, très compactes, avec une bonne optimisation des dimensions corps/objectif/écran pour un poids convenable. Idéales à avoir dans la poche, surtout quand on ne peut pas accéder à son sac à dos pour sortir un boîtier plus conséquent.
On remarque rapidement que la Go Pro Hero 6, qui n’a plus besoin de boîtier étanche depuis la version 5, est plus optimisée pour les conditions climatiques difficiles, avec une meilleure tropicalisation, quand la RX0 de Sony s’embue plus facilement.
Les deux sont données pour une utilisation à 10 m de profondeur sans boîtier additionnel. L’optique de la Sony apparaît d’emblée plus qualitative, occupant toute la façade de la caméra. La Hero 6 possède deux écrans, dont un tactile à l’arrière, très pratique pour accéder aux settings avec des menus simplifiés, quand celui de la RX0 est peut-être trop petit pour être vraiment utilisable.
La GoPro a deux boutons : un supérieur pour déclencher l’enregistrement dès l’allumage et un latéral pour basculer d’un mode de prise de vue à l’autre. Très facile donc à manipuler, même avec des gants ou lorsque la caméra est fixée sur un casque. Des bips viennent confirmer le déclenchement, ce qui la rend très pratique « en action ». On sent que la marque a une équipe d’athlètes de différents sports qui testent leurs caméras depuis des années et leur rendent des retours pertinents. Cette dernière version propose un mode de commande vocale qu’on jugera plutôt anecdotique.
La Sony a elle aussi deux boutons sur le dessus pour allumer et déclencher, mais six autres à l’arrière viennent permettre d’accéder aux menus, qui s’avèrent très denses et fastidieux, rendant difficile le changement de paramètre en extérieur quand la forte luminosité rend l’écran peu lisible ; et le besoin de porter des gants limite l’accès aux boutons.
La Sony est équipée d’un pas de vis et d’un point d’attache pour une lanière, bien rassurant quand on s’en sert dans des situations engagées. La GoPro, quant à elle, est « lisse » mais vient avec un frame compatible avec toute la gamme d’accessoires de la marque, pour la fixer sur tous types de supports, casque, planche, bâton etc., selon l’activité pratiquée. La batterie de cette dernière est plus convaincante, notamment par grand froid.
Pour résumer, la GoPro a une meilleure ergonomie pour une utilisation en pratique sportive. Mais voyons maintenant ce qui fait une caméra, à savoir sa qualité d’image.
La RX0 est équipée de l’excellent capteur CMOS Exmor RS de type 1p au format d’image 3:2, d’environ 15 M de pixels, associé au moteur BIONZ X. À savoir le même capteur que sur le RX100 V plus volumineux.
La Hero 6, de son côté, a un capteur bien plus petit, de 1/2,33p pour 12 M de pixels, mais avec la nouvelle puce GP1 qui améliore nettement les performances par rapport à la version 5.
La GoPro est connue pour son objectif très grand angle, qu’on peut paramétrer en mode « linear » ou « wide » de type fisheye.
La Sony a, elle aussi, une focale fixe de type grand angle, produite par Zeiss avec une construction en six groupes, pour un angle de prise de vue d’équivalent 24 mm qui limite les déformations, mais aussi forcément l’angle de champ. Cela est appréciable pour les photos, mais s’avère être un bémol pour les vidéos, car l’angle est un peu trop serré pour les self shots et surtout les vibrations apparaissent plus marquées, d’autant plus qu’il n’y a pas de stabilisation, à l’inverse de la Hero 6 qui est assez bluffante sur cet aspect-là, la stabilisation étant tellement efficace qu’un gimbal devient presque superflu.
La RX0 a un rendu d’image impressionnant pour ce format de caméra, avec un bon piqué, une excellente restitution des couleurs et une très bonne gestion des forts contrastes. On peut dire qu’il n’y a pas de commune mesure avec la Hero 6 qui, en plus des déformations d’image très marquées, a un rendu des couleurs assez particulier et un flare plutôt désagréable.
Les deux s’en sortent bien en basse lumière, avec le mode Photo de nuit de la GoPro et un rendu bluffant de la RX0 au lever du jour, qui produit une image peu bruitée en conditions pourtant très sombres grâce à la sensibilité de 12 800 Iso.
Les deux proposent un mode Raw pour les images fixes et diverses cadences pour les images animées afin de pouvoir ralentir les actions en postproduction.
La Sony monte jusqu’à 100p en HD avec enregistrement sur carte micro-SD et propose un signal 4K non compressé via la sortie micro-HDMI, à garder pour une utilisation en studio donc. Les débits d’enregistrement sont assez élevés, notamment dans le codec XAVC S. Notons que la Sony a un mode qui monte jusqu’à 1 000 images par seconde, ce qui est extrêmement rare sur le marché, mais pour un débit réduit qui rend ce mode anecdotique car la qualité d’image n’est pas convaincante.
La GoPro, de son côté, propose différents formats d’enregistrement, dont le 4:3 bien pratique pour réajuster le cadre de l’image en postproduction. Les cadences en enregistrement sur carte micro-SD montent à 60p en 4K et 240p en full HD.
La vitesse de déclenchement est équivalente entre les deux caméras pour filmer, mais quand il s’agit de prendre une photo, la RX0 sera plus réactive à condition d’être configurée au préalable dans ce mode de prise de vue. Le temps entre deux images est plutôt lent pour les deux.
Les deux caméras proposent des fonctions connectées pour accéder à ses images depuis son téléphone afin de les partager plus rapidement. L’appli Studio de GoPro est très intuitive et agréable à utiliser, sur ordinateur et mobile.
En résumé, je dirais que la qualité d’image et l’éventail de réglages possibles de la RXO en font une caméra plus qualitative, mais son ergonomie n’est pas vraiment pensée pour une utilisation en action, à l’inverse de la Hero 6 qui est extrêmement efficace pour capturer les sports. Je l’imagine donc davantage comme une caméra complémentaire pour un tournage en studio, d’autant plus qu’elle peut être pilotée en régie, que sur le casque d’un athlète. À voir donc en fonction du type de tournage.
Pour faire des images fixes je choisirais sans hésitation la Sony, car le rendu de celles de la GoPro est moins convaincant, mais pour la vidéo la seconde remplira davantage ses promesses lorsqu’il s’agira d’images saisies en pleine action.
Ce qui est sûr, c’est que ce type de caméra était idéal pour m’accompagner au sommet du mont Blanc, car le poids et l’encombrement d’un boîtier classique ne m’auraient pas permis de m’en servir, le sac à dos étant la plupart du temps inaccessible et le temps étant compté pour redescendre à ski jusqu’à Chamonix avant que la température ne devienne trop élevée et les glaciers plus dangereux. Bref de bons compagnons à avoir dans la poche en toute occasion, pour ramener des images de ses aventures.
Article paru pour la première fois dans Mediakwest #28, p.16/17.