Il y a trente ans, la video était analogique, peu pratique à utiliser, et peu adordable finacièrement.
La pellicule et la diapositive restaient des supports de choix. Aujourd’hui, le numérique a démocratisé l’arrivée sur le marché d’outils de prises de vues et de montages. Toutefois, il existe un clivage entre les outils, les usages et les techniciens.
Cette conférence balaie les grandes évolutions, et fixera son attention sur la divergence entre low-cost et très haut de gamme ‘outils grand public ou cinéma numérique), montagecompositing et même étalonnage.
La conférence débute par un rappel historique présenté par Jacques Pigeon, enseignant à Louis Lumière et journaliste à Sonovision. Il a puisé dans ses archives pour montrer la photo d’un ensemble de tournage avec caméra tri-tubes et un magnétoscope portable 1 pouce qui datent de 1982, puis, en 1983, les premiers caméscopes au format Betacam de Sony et MII de Panasonic. En 1986, on note l’arrivée des premiers enregistreurs numériques avec le format D1 conçu par Sony et BTS. Autour du codage 4-2-2, toute une série de formats d’enregistreurs numériques succède à ce pionnier, le Digital Betacam, le DCT et le D5. L’année 1986 voit arriver les premières caméras à capteurs CCD, qui permettent de réduire le poids et la consommation électrique. Au début des années 90, Avid révolutionne la post-production avec les logiciels de montage virtuel. En 1995, le numérique arrive sur le marché grand public avec le format DV. À partir de 2003, c’est le commencement de la fin pour la bande magnétique avec le lancement de l’enregistrement sur disque optique chez Sony avec le XDCam et l’utilisation de la mémoire flash chez Panasonic avec les cartes P2. Ce n’est pas un simple changement de support car le travail en mode fichiers révolutionne la post-production et le transfert vers les disques durs, les bancs de montage et les serveurs.
Pascal Buron, responsable de la post-production chez TSF explique sa société intervient en prestation pour le cinéma et la fiction TV. Il y a encore 2 ans, la filière cinéma employait de manière quasi exclusive de la pellicule argentique 35 mm et parfois du 16 mm en raison de sa légèreté. L’arrivée du numérique dans ce secteur et l’évolution des processus de production sont liées à deux causes : « l’accélération de l’équipement des salles en projection numérique. Les équipes artistiques ont pris conscience que la captation photochimique n’était plus la seule solution. Et la pression économique, car tourner en pellicule revient un peu plus cher. » Ces évolutions sont dues aussi aux modifications de la diffusion. La fiction TV était un secteur où le 16 mm avait une présence majoritaire depuis longtemps. Lors du passage à la TV HD, les diffuseurs ont constaté que le grain du 16 mm posait des problèmes au niveau compression. Du coup cela a précipité la demande vers des caméras numériques, capables de restituer parfaitement l’image, y compris après la compression. Cela a conduit à utiliser des caméras 2/3 pouces pour les tournages de fiction, ce qui n’était pas sans poser des problèmes pour la gestion des optiques qui n’ont pas les mêmes focales et les mêmes montures que les caméras 35 mm. Cela a duré plusieurs années jusqu’à l’arrivée des caméras RED équipées de grands capteurs, début d’une lignée de nouvelles caméras dédiées cinéma numérique, comme l’Alexa d’Arri, l’EPIC de RED ou bientôt la Pénélope Delta d’Aaton.
Frédéric Roland, responsable des marchés vidéo professionnels chez Adobe, constate, pour sa part, qu’il y a une quinzaine d’années, pour faire de la post-production de qualité, il fallait disposer de machines avec cartes dédiées pour effectuer les calculs des effets spéciaux. Avec l’émergence des nouveaux processeurs qui apportent beaucoup plus de puissance, c’est la partie logicielle qui devient prépondérante. Après un premier lancement à la fin des années 90, Adobe fait le constat il y a 5 ou 6 ans qu’avec l’arrivée d’Internet et l’augmentation de la bande passante et le développement des contenus enrichis, la production vidéo concerne tous les métiers de la communication (web, presse, multimédia) et ne se limite plus à la production TV traditionnelle. Adobe a pris la décision de réécrire complètement son produit de montage vidéo, Premiere Pro de manière à offrir un outil adapté à tous ces marchés mais aussi pour répondre à la problématique des nouveaux formats de tournage et des nouveaux codecs.
« Mais au-delà des outils, la vraie question qui se pose ce sont les workflows pour travailler plus efficacement autour du métier de la post-production. Il y a 10 ou 15 ans les process étaient assez linéaires, aujourd’hui on se rend compte qu’on cherche à paralléliser au maximum toutes les étapes et à mettre en place un travail collaboratif. La tendance est à unifier tous les métiers ».
Jean-Philippe Aguer, consultant workflow chez Avid, rebondit sur cette question. Tout le monde utilise potentiellement les mêmes outils. Avec la multiplication des codecs et des formats cela est devenu très compliqué. Ce ne sera pas le même workflow si on filme une vidéo à mettre en ligne sur Internet ou si on réalise un film pour le cinéma. Avant on faisait déjà des choix au moment de la captation. Avec les nouveaux outils de tournage, on reçoit des centaines des gigaoctets d’images. C’est au moment de la post-prod que nous devons faire ces choix. Du coup il faut travailler de manière collaborative pour se partager les tâches de manière à être plus efficace. Déjà depuis plusieurs années, que ce soit une fiction ou en documentaire, plusieurs personnes travailleront sur le même élément car c’est devenu facile de se partager les mêmes images, stockées au même endroit. C’est plus délicat de se partager le même projet, quand on travaille sur le même film ou la même émission en intervenant sur des parties différentes. Là encore il faut connaître les processus et les workflows.