Festival de la fiction TV de la Rochelle: la télé sur le qui-vive

Pour sa 16e édition, le festival de la fiction TV de la Rochelle, qui s’est tenu du 10 au 14 septembre dernier, a réuni près de 2000 professionnels et plus de 35 000 spectateurs. Une édition marquée par la venue de Fleur Pellerin en nouvelle Ministre de la Culture, une table ronde sur l’arrivée de Netflix notamment.
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Hasard du calendrier, l’arrivée de Netflix le 15 septembre en France a coïncidé, peu ou prou, avec le festival de la fiction TV qui réunit chaque année producteurs, diffuseurs et, accessoirement, stars du petit écran à la Rochelle. Et d’écran on en a beaucoup parlé lors de cette édition.

 

Fiction française : un bond qualitatif… sans audace

Quand on le questionne sur l’état de santé de la fiction française, le président du Festival et producteur Quentin Raspail répond : « état satisfaisant, sur le qui-vive ». S’il confirme le fait que la production made in France a repris des couleurs, parlant de bon qualitatif, il contrebalance presque immédiatement ses propos en évoquant un « manque d’audace de la part des créatifs. Il faut qu’on laisse à ceux-ci une plus grande liberté de ton, d’écriture », le « on » visant bien évidemment les responsables de programmes des chaînes.

 

L’arrivée d’un nouvel acteur dans ce landernau serait-il un atout ? « Hormis Canal+, je ne crois pas que les chaînes aient à craindre de l’arrivée de ce nouvel acteur », tempère Quentin Raspail qui se refuse à nommer Netflix, « invité à ce festival mais qui n’a même pas daigné répondre ». Quant aux producteurs, « ils ne sont pas inquiets. Et puis, il ne faut pas se tromper : ceux qui financent la fiction, ce sont les producteurs nationaux, les chaînes de télévision et les coproducteurs étrangers. L’importance donnée à une seule série produite par ce nouvel acteur est disproportionnée par rapport à la création telle que nous l’entendons depuis des années ».

 

En écho à ces propos, Fleur Pellerin a tenu à rappeler dans son discours qu’elle aurait cœur de défendre les intérêts des producteurs et diffuseurs tout en appelant à ne pas craindre Netflix.

 

Plateaux de tournage : on rebat les cartes

Coïncidence de l’actualité, deux annonces concernant des plateaux de tournage ont été faites lors de l’ouverture du festival de la Rochelle. La première, à plus d’un titre, est la reprise par TSF des « Studios de l’Océan », gérés jusqu’alors par Jean Cressant, président du groupe Mativi… à la Rochelle !

 

Ces « Studios de la Rochelle », la nouvelle dénomination, sont implantés sur près de 4 000 m2, dont deux plateaux de 900 et 550 m2, un espace de construction et de stockage pour les décors, 14 loges comédiens, des loges HCM, des bureaux de production ainsi qu’une rue intérieure couverte. « Nous ne sommes pas là par hasard », a commenté Thierry de Segonzac qui avait fait le déplacement en terres rochelaises, « mais nous souhaitons nous appuyer sur la volonté d’une collectivité avant de développer une activité. A ce titre, les contacts que nous avons eus avec le Maire, Jean-François Fountaine, se sont avérés très positifs, avec une envie de la part de la Ville d’accroître le nombre de tournages sur la Rochelle et l’agglomération ».

 

Les Studios de La Rochelle seront gérés, comme le studio du Pôle Image de Bègles, par Nathalie Goutas (TSF Aquitaine). Si TSF est présent via ses moyens techniques sur La Rochelle, il n’est néanmoins pas prévu d’ouvrir une activité de location de caméras. Ce sera le 15 octobre, lors du prochain conseil municipal, que sera entériné officiellement ce passage de témoin entre Mativi et TSF pour l’exploitation de ces studios.

 

Plus au Sud, mais également présent au festival, Olivier Marchetti présentait aux producteurs sa nouvelle offre de « lieux de tournage », Provence Studios, basé à Martigues. Etabli sur les fondations d’une ancienne entreprise de transports et de logistique, Provence Studios s’étend sur 22 hectares de terrain et comprend 26 000 m2 de potentiels plateaux. Europa Corp Télévision y a déjà tourné plusieurs séquences de la saison 3 de « No Limit » avec Vincent Elbaz. Avec une offre « très modulable en fonction des besoins des productions qui nous sollicitent », Olivier Marchetti espère proposer une alternative aux tournages dans le Sud de la France – fiction, long métrage ou publicité. Un programme d’investissement, qui a déjà débuté et s’étalera sur plusieurs mois, prévoit la réalisation de loges et bureaux de production, l’ouverture d’une école de cascades. Les prestataires (loueurs de caméras entre autres), politiques et producteurs qui ont fait le déplacement ont, semble-t-il, tous marqués un intérêt certain à cette nouvelle offre.

 

VFX : 2 unitaires pour Trimaran

Spécialiste du sport, avec notamment sa solution GeoRacing, la société Trimaran est également connue pour son activité VFX et son domaine de prédilection est la fiction TV. Bonne pioche pour cette édition du festival de la Rochelle puisque deux unitaires – « Soldat blanc » d’Erick Zonca (Canal+) et « Piège de glace » (France 2) – étaient présentés, mais pas en compétition.

 

« Nous avons réalisé quelque 300 plans truqués sur « Soldat blanc » et 320 sur « Piège de glace » en quatre mois seulement », résume Olivier Emery, fondateur de Trimaran. Hasard du calendrier, ces deux productions ont été tournées sur la même période, obligeant les équipes à travailler d’arrache-pied. Qu’il s’agisse du Cambodge ou de Chamonix, les superviseurs VFX, Fabien Girodot et Matthieu Floury, se sont rendus sur place pour collaborer étroitement avec les réalisateurs et producteurs. « Trimaran a été présent dès la phase de préparation de ces deux téléfilms pour une meilleure interaction durant le tournage et, de facto, une production des effets visuels plus en phase avec les besoins ».

 

Les prestataires VFX en fiction TV sont assez peu nombreux et Trimaran a su se faire une place privilégiée ; « nous sommes clairement identifiés depuis de nombreuses années et sommes en mesure d’apporter un service de qualité dans des budgets restreints ». Pour « Piège de glace » et ses 320 plans, le budget VFX était de 260 000 €… sur un budget global de 2,5 M€. GTV a reçu l’aide aux nouvelles technologies du CNC à hauteur de 130 000 € soit la moitié du budget total VFX. « En règle générale, on sait que les producteurs de fiction TV mettent entre 2 et 3% de leur budget dans les VFX. Ici, on atteint 10% ce qui est un cas rare qui nous a permis de travailler avec plus de confort ».

 

Sur « Soldat blanc », dont l’action se situe durant la guerre d’Indochine, Trimaran a réalisé des multiplications de foule, de véhicules, de la modélisation 3D, etc. Avec « Piège de glace », téléfilm catastrophe tourné à Chamonix, le studio a multiplié les prouesses, entre extension de paysages, séquences full 3D, camera mapping et de nombreux matte paintings.

 

Avec un flux de production proche de celui des gros studios, de la suite Adobe (Photoshop, After Effects) à Nuke en passant par 3dsMax, Vray ou Boujou pour le tracking, DaVinci pour le pré-étalonnage, Trimaran poursuit sa course. « Sur ce festival, nous avons établi de bons contacts et trois projets assez conséquents ont été identifiés », explique Olivier Emery : deux séries et un unitaire.

 

L’édition 2014 du Festival de la fiction TV de la Rochelle aura donc donné un ton très professionnel à une manifestation qui se veut habituellement orientée grand public. Plus que jamais la fiction TV concentre tous les intérêts d’un secteur en pleine mutation. Sur le qui-vive en quelque sorte…

 

A propos des illustrations qui accompagnent l’article :

Pour l’unitaire « Soldat blanc » d’Erick Zonca, diffusé sur Canal+, Trimaran a réalisé quelque 300 plans truqués. Pour l’anecdote, aucune arme n’a eu la capacité de tirer durant le tournage. Toutes les flammes et tracés de balle ont été reconstitués numériquement © Trimaran

 

…Pour l’un de ses tout premiers déplacements comme Ministre de la Culture, Fleur Pellerin a tenu un discours volontariste au Festival de la Rochelle, arguant du fait que Netflix pouvait être une opportunité et non un risque (cf. photo d’illustration)