…À ce titre, Le Petit Prince s’est vu décerner le trophée UniFrance qui récompense le film français ayant obtenu le plus d’entrées à l’étranger en 2015. Toutes ces récompenses gratifient un travail hors du commun qui mérite largement que l’on s’attarde sur sa genèse…
Une production internationale au service d’une œuvre universelle
Le Petit Prince est la première adaptation au cinéma du livre éponyme d’Antoine de Saint Exupéry, l’un des ouvrages les plus lus au monde. Le projet est né il y a huit ans, lorsque les producteurs Aton Soumache, Dimitri Rassam et Alexis Vonarb ont obtenu l’accord d’Olivier d’Agay, président de la fondation Saint-Exupéry. Le film a bénéficié d’un budget de 57 millions d’euros, notamment grâce à des préventes au Japon, en Europe, en Russie et en Amérique latine.
« Nous avons voulu marier l’excellence d’une filière française et européenne à l’expérience du storytelling américain », commente Dimitri Rassam. Pour mener à bien leur projet, les producteurs ont sollicité Mark Osborne, le réalisateur de Kung Fu Panda.
Mark Osborne et son équipe ont d’abord développé le projet à Los Angeles. Le réalisateur s’est ensuite installé à Paris pour s’atteler au story-board. Dans le cadre d’une association entre Onyx Entertainment (à Paris) et Mikros, l’équipe s’est aussi établie un temps à Montréal pour les étapes de l’animation et de l’éclairage.
« Nous avons engagé tous nos collaborateurs en externe, nous avons monté notre société de production indépendante et mis en place notre propre chaîne de fabrication en fonction de nos besoins spécifiques. C’était génial, car nous n’étions liés à aucune structure existante. L’inconvénient, c’est qu’on construisait les rails au moment même où le train roulait, si bien que c’était assez effrayant ! », se souvient Mark Osborne.
Un film dont la narration s’appuie sur l’infographie mais aussi du stop-motion…
« C’est un projet qui, à bien des égards, nous a dépassés et nous a aidés à grandir professionnellement. Nous sommes partis avec l’objectif de faire aussi bien que DreamWorks ou Pixar, non pas par mégalomanie, mais parce que Le Petit Prince devait être servi par ce qui se fait de mieux en animation. C’est grâce à la vision et à la sincérité de Mark que nous avons pu réunir les meilleurs talents au monde », commente Dimitri Rassam.
« Au début du film, quand la petite fille découvre le livre de l’aviateur pour la première fois, on plonge dans cet univers en stop-motion à travers son regard, et c’est un moment très émouvant, poursuit Aton Soumache… Mark a découvert les dessins originaux de Saint-Exupéry à la Morgan Library de New York sur lesquels figurait une petite fille ! Il a constaté qu’ils avaient été réalisés sur un papier extrêmement fragile et constellé de taches de café et de ratures, si bien qu’ils ont failli ne jamais parvenir jusqu’à nous. Mark s’est alors dit que cet univers était tellement fragile qu’il voulait retrouver l’émotion du papier avec la stop-motion. On s’est donc lancé dans ce projet hallucinant de tourner 16 minutes du film en stop-motion, avec des équipes techniques spécifiques et un budget spécifique : pour nous, c’est la «volumisation» du livre ! ».
Au final, l’infographie, permet de retranscrire un « monde réel », proche de celui qu’on voit dans les productions Pixar et DreamWorks et le stop-motion traduit l’univers poétique du Petit Prince à travers le regard de la petite fille…
« Nous avons créé un studio avec nos propres outils technologiques à Paris où l’on a travaillé pendant deux ans. Par la suite, Mikros nous a hébergés dans ses locaux à Montréal, en accueillant nos techniciens et artistes. Là-bas, nous avons mis en place une chaîne de fabrication, en créant des outils spécifiques pour le film, afin de garder l’intention de Mark Osborne en matière de lumière et graphisme », retrace Aton Soumache.
Bienvenue dans le monde du stop-motion !
Pour réunir une équipe à même de réaliser les scènes de stop-motion, Mark Osborne a choisi de faire appel à Jamie Caliri qui avait réalisé les très beaux génériques des Désastreuses aventures des orphelins Baudelaire et de United States of Tara.
« Nous avons décidé d’utiliser du papier comme support pour évoquer ces pages non reliées que l’aviateur a conservées toutes ces années. On part donc d’une scène entièrement réalisée en papier au début, puis, alors qu’elle gagne en volume, on utilise un mélange de papier et d’argile, qui permet d’avoir des effets d’aquarelle sur les visages. Tout ce dispositif est construit comme au théâtre, mais on éclaire ensuite le décor de manière réaliste », indique Jamie Caliri.
L’une de ses scènes préférées se situe au début du film. « Dans la première séquence, on introduit ce monde de papier à travers le regard de la petite fille. On passe de la scène en infographie à ce monde de papier en stop-motion tel qu’elle l’imagine. Le papier se transforme ensuite en nuages, puis en dunes de sable. Pour cette séquence, nous avons tout simplement utilisé du papier découpé et peint, déployé dans un espace 3D, autrement dit sur une table », explique-t-il.
Dans le cadre de cette phase d’animation, la conception du personnage du Petit Prince a fait l’objet de la plus grande attention… « En matière d’animation pure, je me suis d’abord demandé comment on allait bien pouvoir s’y prendre pour l’écharpe du Petit Prince, se souvient Anthony Scott, le directeur de la stop-motion. Dans les illustrations du roman, l’écharpe flotte le plus souvent au vent. J’ai interrogé Mark à ce sujet et on a décidé qu’on allait évaluer la force du vent pour chacune des scènes. Le vent est devenu un personnage à part entière ! Une fois cette décision prise, les animateurs avaient un point de repère pour animer l’écharpe ».
En moyenne, un animateur produisait 5 à 15 secondes de film utile par semaine, en fonction de la complexité des plans dont il s’occupait.
Une équipe de choc !
On peut presque dire que les fées se sont penchées sur cette œuvre, puisque les meilleurs techniciens de l’animation européenne et de grands talents des studios hollywoodiens ont mis la main à l’ouvrage.
Parmi tous les talents impliqués, on peut citer le scénariste et directeur d’écriture Bob Persichetti qui avait auparavant collaboré à Tarzan, Mulan et Le bossu de Notre-Dame chez Disney, ainsi qu’à Shrek 2, Monstres contre Aliens et Le Chat Potté chez DreamWorks.
Le chef-décorateur Lou Romano, qui a mis au point l’univers visuel du film avait antérieurement travaillé sur Indestructibles et Là-haut.
La chef-décoratrice Céline Desrumaux avait, pour sa part, déjà été sollicitée sur Harry Potter et les reliques de la mort – 1ère partie, Astérix et le domaine des dieux.
Le créateur des personnages, Peter de Sève, s’est quant à lui fait connaître par la saga L’âge de glace, Tarzan (Disney), ou encore Le prince d’Égypte (DreamWorks), 1001 Pattes et Le monde de Nemo (Pixar)… Enfin, Jason Boose, superviseur animation, a été animateur pour Lilo & Stitch (Disney), ainsi que Cars, Ratatouille et Là-haut (Pixar).
La production a aussi fait appel au compositeur Hans Zimmer, qu’on ne présente plus, puisqu’il compte à son actif une centaine de musiques de films et s’est vu, entre autres, couronné d’un Oscar, deux Golden Globes, trois Grammy…
Sur les écrans français depuis juillet 2015, l’adaptation de l’œuvre de Saint Exupéry réalisée par Mark Osborne, produite par Dimitri Rassam, Aton Soumache et Alexis Vonarb, est loin d’avoir terminée sa carrière, puisque The Little Prince sortira sur les écrans aux USA le 18 mars prochain…
(1) Source : CNC au 31 décembre 2015