Monsters University reprend du poil de la bête
Invités d’honneur du Festival International du Film d’Animation d’Annecy, le réalisateur Dan Scanlon et la productrice Kori Rae sont revenus sur la production de cette préquelle de Monsters Inc.
Benjamin Mallet: Après le succès incroyable de Monsters Inc., quels étaient les principaux écueils à éviter ? Pourquoi le choix d’un film qui se déroule avant et non une suite du long-métrage de Pete Docter ?
Kori Rae : Nous avons réfléchi pendant 5 ans à ce que nous pourrions faire après Monsters Inc., en évitant de nous répéter. Il y avait tellement d’options possibles mais on s’est dit que ce serait intéressant de savoir comment ils sont devenus ce tandem inséparable, alors qu’ils sont si différents.
Dan Scanlon : On a autant, que faire se peut, tenté de penser le film comme indépendant du premier, même s’il est forcément connecté.
Et le choix de Bob comme personnage principal, plutôt que Sulli, plus charismatique ?
D.S. : En fait, nous avons d’abord pensé à mettre Sulli en avant dans une première version. Mais c’est avec Bob que l’intensité émotionnelle était la plus présente, davantage qu’avec Sulli.
Était-ce possible de reprendre les assets d’un film sorti il y a 12 ans ?
K.R. : Nous avons tout recréé de A à Z. Les données de Monsters Inc. ont simplement servi de références.
D.S. : Il n’y a pas eu de difficultés particulières à tout recréer, hormis le fait que nous avions énormément plus de personnages, avec beaucoup de plans serrés. Et la fourrure des monstres, de Sulli en particulier, est souvent au premier plan. Nous avons donc optimisé notre système de génération de fourrure pour pouvoir avancer plus efficacement.
K.R. : Faire vivre le campus, avec parfois jusqu’à 500 étudiants dans le cadre – certains avec des tentacules, d’autres des poils, d’autres encore baveux – s’est avéré le challenge le plus important tant du point de vue des designs que de la technique.
La séquence dans le monde des humains contraste énormément avec le reste du film, visuellement et aussi du point de vue de l’histoire.
D.S. : L’idée était de créer un contrepoint total avec le monde des monstres. On a créé des environnements sombres, des lumières très crues pour les torches, dans une ambiance très « survival movie ».
Justement, quelle technique avez-vous choisie pour le lighting du film ?
K.R. : Nous avons utilisé une nouvelle version de Renderman, basée sur l’illumination globale qui donne un look plus réaliste, plus riche dans le détail.
Le parapluie bleu : une love story avec la pluie
Avec ce court-métrage, Saschka Unseld retrace les amours contrariées de deux parapluies dans une ville qui prend vie sous l’averse.
Benjamin Mallet: La séquence d’ouverture, lorsque la pluie se met à tomber, est très proche de la prise de vue réelle. Pourquoi ?
Saschka Unseld : ça a été notre intention dès le début car nous voulions réellement opérer un glissement vers un monde plus magique, lorsque la pluie donne vie aux différents éléments d’architecture… et aux parapluies. Si cela avait eu un sens de tourner en prises de vues réelles, je crois bien que j’aurais tenté le coup. En fait, les contraintes auraient été trop importantes pour que ce soit viable sur un court-métrage. Alors, nous avons filmé certains plans et angles en live mais uniquement à titre de références pour que les animateurs puissent s’en inspirer.
Tout le film se passe sous la pluie, à un angle de rue, avec des lumières qui sont réfractées, ce rendu si particulier. Comment avez-vous procédé ?
S.U. : Lorsque j’ai pitché l’histoire aux différents départements qui seraient impliqués dans la production, tous ont été excités à l’idée de se lancer dans le projet. Imaginez : une foule de parapluies dans une ville la nuit, éclairée uniquement par des lumières artificielles !
La pluie est un personnage à part entière et le département FX a superbement travaillé pour lui donner, en termes de vitesse de chute, de réflexion et de pleins d’autres paramètres, des émotions qui évoluent au fur et à mesure de l’histoire.
En fait, la pluie n’est pas réaliste dans le sens où il ne s’agit pas de gouttes intégrant les propriétés de l’eau. Image par image, on se rend compte qu’il s’agit plus d’une longue trainée liquide qui détient, déjà en elle, des fonctions de motion blur. Ainsi, on a pu plus facilement jouer sur la brillance de ces liquides en fonction de l’arc narratif, en jouant sur cette fonction.
Dans cet environnement très travaillé techniquement, les deux parapluies, avec seulement deux points et un croissant pour figurer yeux et bouche, semblent décalés. Normal ?
S.U. : J’aimais bien cette idée en effet, d’allier la haute technicité utilisée sur l’environnement et cette animation un peu nostalgique que l’on a sur les deux parapluies.
Votre film a-t-il bénéficié d’innovations particulières ?
S.U. : Nous avons été le premier film à tester le nouveau pipeline d’éclairage de Pixar, basé sur Renderman – puis il a été déployé sur Monsters University – qui utilise l’illumination globale. La plupart des films Pixar s’appuient sur le rendu dans le pipeline de production. Sur The blue umbrella, nous avons privilégié le compositing car cela nous a permis de jouer avec la profondeur de champ plus facilement, d’intégrer énormément de détails qui auraient été fastidieux à rendre. Le film tient plus de l’approche picturale que de la recherche constante du détail. Nous avons aussi utilisé de la camera capture pour avoir une plus grande liberté dans leurs mouvements. Sur un court, on est plus libre pour expérimenter et cela nous convenait parfaitement.