Les dos de transmission 4G, au-delà du direct (partie I)

Les dos de transmission 4G sont devenus au fil des ans les outils indispensables pour la couverture de l’actualité en direct. Avec l’amélioration de leurs performances et de la couverture des réseaux 4G, leur usage s’élargit à d’autres activités de production TV comme les variétés, la télé réalité ou le sport.
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L’usage des unités de transmission 4G s’est généralisé pour la couverture de l’actualité. Chaque chaîne nationale possède plusieurs dizaines d’unités et régulièrement elles renforcent leur parc en faisant appel à la location lors des évènements majeurs (coupes du monde, JO, élections nationales, festivals…).

Les dos de transmission 4G se sont allégés avec la sortie de modèles mieux intégrés et de taille plus réduite. Avec des caméscopes plus compacts, l’objectif est de réduire le barda des équipes de reportage et de pouvoir fixer l’unité de transmission directement à l’arrière de la caméra, même si pour des raisons sanitaires, cette solution n’a pas la faveur des JRI sous nos contrées. Tous les constructeurs ont élargi la palette des terminaux pouvant transmettre des signaux vers leurs serveurs : logiciels d’encodage pour micro-ordinateurs, caméras IP, applications pour smartphones. Les journalistes des principales rédactions en disposent sur leurs smartphones mais leur usage reste exceptionnel.

 

Des services de back-office encore plus complets

Les évolutions récentes des dos 4G se situent aussi du côté des services de back-office. Tous les fabricants ont développé des outils de supervision des équipements, de management des flottes d’émetteur et de routage des flux. Leur première fonction est de contrôler à distance le bon fonctionnement des unités de transmission pour compenser les éventuels aléas de la liaison : affichage de l’image et du débit instantané, des niveaux de qualité, l’état des batteries, etc. Ces logiciels servent également à paramétrer les unités pour décharger de cette tâche les JRI déjà fort occupés par ailleurs. Les équipes techniques, depuis la chaîne les assistent aussi pour trouver une localisation mieux adaptée afin d’améliorer la qualité des images. Comme les unités 4G sont équipées de GPS, il est facile de les localiser en temps réel sur une carte et de donner des instructions aux équipes en fonction des évènements et de leur position.

Pour obtenir de meilleures performances, il est vivement recommandé de panacher dans le dos 4G, les cartes SIM de plusieurs opérateurs, entre lesquels le flux d’image sera réparti. La facilité d’usage entraîne une consommation data difficile à modérer. Les outils de management servent également au report des consommations de chaque carte SIM et de chaque opérateur. Cela permet de mieux anticiper auprès des fournisseurs de cartes SIM et rassure les équipes sur le terrain pour éviter de passer en mode « Fair Use » si la consommation data est dépassée.

Selon la situation, il est possible d’inhiber certaines cartes pour en limiter la consommation, et les remettre en route dans une autre localisation plus favorable, et tout cela à distance. Cette fonction est particulièrement utile lorsqu’une équipe est à l’étranger et doit faire face à des problèmes de roaming. Pour une analyse ultérieure des problèmes, ces outils de management enregistrent des fichiers log des transmissions et après coup, ces données sont analysées pour comprendre l’origine des difficultés.

 

Des fonctions de routage

Une autre fonction largement développée dans les outils de management concerne le routage des flux. Avec l’augmentation du nombre d’unités de reportage transmettant en direct, une chaîne ne disposera pas d’autant de sorties SDI au niveau de ces serveurs de réception. Il faut donc pouvoir réaffecter rapidement les images transmises vers les entrées de la régie du plateau en fonction de l’actualité. Mais avec la diffusion vidéo par IP et les live sur les réseaux sociaux (voir ci-après), ces fonctionnalités de routage des flux et leur éventuelle conversion deviennent des éléments indispensables pour accompagner l’exploitation des dos 4G.

Le premier à avoir ouvert la voie est TVU avec son service TVU Grid. Il fonctionne un peu à la manière d’une grille de commutation avec en entrée toutes les unités de reportage en action, mais aussi des sources SDI ou des flux vidéo IP en provenance d’autres systèmes Grid. En sortie, les signaux sont aiguillés vers des sorties SDI pour exploitation en plateau ou vers des transports en IP pour attaquer des serveurs TVU Grid implantés dans d’autres chaînes affiliées.

Ainsi une unité de reportage peut alimenter plusieurs chaînes simultanément, avec éventuellement une vente et une tarification. Grâce à des options il est possible de transmettre directement vers des CDN pour intégration à des services web ou vers les principaux services live des réseaux sociaux. L’un des principaux avantages du système réside dans sa capacité à effectuer des commutations propres à l’image près entre les sources disponibles.

TVU Grid n’est pratiquement pas utilisé en France car les fonctionnalités initiales sont avant tout adaptées à l’organisation des chaînes de TV américaines, qui fonctionnent en syndication et où les stations d’un même réseau sont réparties sur plusieurs fuseaux horaires.

LiveU propose LiveU Central qui regroupe à la fois les outils de management et d’aiguillage de contenus. Aviwest a choisi une approche un peu différente, d’un côté, un outil de management et de supervision avec DMNG Manger, et de l’autre le serveur DMNG StreamHub avec les fonctions de décodage, de conversion et d’aiguillage de contenus.

Plutôt que de l’appeler serveur de réception, Erwan Gasc, directeur d’Aviwest, préfère le dénommer serveur transceiver (émetteur-récepteur). Sa fonction première est de recevoir et de décoder les signaux envoyés depuis les dos 4G, les encodeurs en châssis rack, des caméras IP ou les applications pour laptop ou smartphone. Il assure également la conversion et l’émission en vidéo sur IP vers d’autres stations StreamHub, vers des CDN, ou des players vidéo sur mobiles. Outre ses fonctions d’enregistrement, la station StreamHub reçoit 16 sources qu’elle peut renvoyer vers 32 destinations dont 4 sorties SDI.

 

Le cloud pour plus de souplesse

Les services et applicatifs liés au dos 4G s’appuient sur les infrastructures IP comme de nombreux outils du cloud. Il était donc logique que tous les constructeurs proposent leurs services dans le cloud. En plus des unités de transmission, les chaînes TV acquièrent les serveurs de réception et de management. Mais pour des usages plus ponctuels comme la production corporate, les émissions variétés ou des retransmissions sportives, la mise en place de ces équipements dans le cloud est mieux adaptée. Par exemple Aviwest propose une alternative « cloud » pour les fonctions de management, de réencodage et de distribution de contenus.

Autre fonction ajoutée par tous les constructeurs à leurs systèmes, le retour son IFB (Interrupted Feed Back) qui renvoie par la liaison 4G, le son final de la chaîne avec les ordres de la régie. Le cadreur à la caméra récupère ce signal sur son casque. Reste juste à trouver un moyen simple de le renvoyer aussi vers le journaliste face à la caméra pour lui éviter la manipulation d’un smartphone en plus de son micro.

 

Élargir les usages au-delà du direct et de l’actualité

Les dos de transmission 4G ont longtemps été associés aux directs pour couvrir l’actualité chaude. Mais leur usage s’est élargi à d’autres types d’émissions et des modes d’exploitation plus diversifiés. Ils sont employés dans des émissions de variétés ou pour le sport.

Yves Bouillon, précédemment responsable des moyens techniques de productions extérieures du groupe TF1, cite ainsi l’émission Téléfoot pour laquelle 80 à 90 % des duplex sont réalisés grâce à des dos 4G. Lors de la coupe du monde de rugby, pour rapatrier l’image des commentateurs, TF1 a déployé des dos 4G exploités uniquement comme encodeur, couplés à une liaison SDSL fournie par le host broadcaster.

Yves Bouillon constate que la fiabilité et la robustesse des signaux se sont améliorées tant du côté des opérateurs que des constructeurs de dos 4G. Même sur des liaisons de plusieurs heures, il n’y a aucun décrochage et surtout la latence et le « lipsync » restent constants. La chaîne utilise régulièrement les dos 4G dont sont dotés ses véhicules SNG pour établir la liaison de secours en parallèle au segment satellitaire ou en complément pour remonter vers le siège des sujets ou des caméras isolées.

Aviwest a fourni les équipements de transmission pour l’émission américaine Live PD (PD : Police Department) produit par Big Fish Entertainment. Le principe est de suivre en direct pendant trois heures d’affilée, les patrouilles de police de six villes américaines. Dans chacune d’elles, trois véhicules sont équipés de trois caméras, plus une équipe à l’extérieur et un drone. Au total, ce sont plus de 40 liaisons renvoyées vers New-York en 4G, WiFi ou satellite avec un mixage des sources de type multicam en plateau.

Dans le domaine de l’évènementiel, Erwan Gasc cite le lancement européen d’une nouvelle voiture couverte en 4G avec retransmission sur Facebook Live. TVU et Aviwest expérimentent chacun de leur côté la réalité virtuelle avec une diffusion en Facebook Live. Le directeur d’Aviwest confirme que « Facebook Live est un véritable catalyseur pour l’élargissement des usages des dos 4G ».

Autre domaine où les technologies développées pour les dos 4G commencent à émerger, la « remote production ». TVU a développé le système RPS (Remote Production System) composé d’un boîtier émetteur et d’un récepteur, chacun dans un rack 1,5 U. L’émetteur avec ses 6 entrées SDI (HD ou SD) multiplexe et encode les images en H.264 4:2:0 (débit compris 0,1 et 10 Mb/s) dans un flux IP sur une double interface Ethernet Gigabit. Avec un signal de référence, les signaux restent synchronisés dans le transport. Deux voies de retour vidéo sont également possibles.

Teradek a développé un système similaire avec le châssis T-Rax. L’avantage de ces solutions réside dans un transport IP sur réseaux publics non managés, mais pour lesquels les constructeurs de dos 4G ont développé des outils de QoS propres à leurs produits. Ainsi ils compensent les aléas de ces réseaux publics. Erwan Gasc confirme cet avantage : « Avec nos produits 4G et leurs codeurs spécifiques, nous ajoutons une brique transmission de qualité contribution sur du réseau internet public non managé et sans QoS à la base ».

Actuellement la plupart des expérimentations de remote production exploitent des liaisons IP dédiées de bout en bout, fort onéreuses pour justement disposer d’une liaison managée sur toute la distance. Les technologies de dos 4G pourraient donc à terme devenir l’un des maillons des outils de remote production.

 

La seconde partie de ce dossier est accessible ici 

 

Extrait de notre article paru pour la première fois dans Mediakwest #21, p. 81-85. Abonnez-vous à Mediakwest (5 nos/an + 1 Hors série « Guide du tournage) pour accéder, dès leur sortie, à nos articles dans leur intégralité. La seconde partie de cet article sera publiée demain…