Les systèmes sans fils utilisant la bande 2,4 GHz pour la transmission audio sont utilisés depuis quelques années, notamment par les youtubeurs et certains vidéastes en quête de légèreté et de simplicité pour leurs productions réalisées avec smartphones ou appareils photo. Face à cette demande, des constructeurs comme Røde ou Saramonic, suivis par une floppée de constructeurs asiatiques proposent aujourd’hui une gamme de produits de plus en plus étoffée. Avec MoveMic, Shure répond aux mêmes besoins.
On connaissait déjà les systèmes HF analogiques et numériques classiques utilisant la bande 470-694 MHz. Sont venus ensuite les systèmes numériques compacts évoluant dans la bande des 2,4 GHz. Utilisant la même plage de fréquences, Shure se distingue en proposant son système MoveMic qui reprend la technologie Bluetooth que nous connaissons tous, mais en l’agrémentant de protocoles propriétaires lui permettant de transporter jusqu’à deux canaux audio directement exploitables par le smartphone, sans la nécessité absolue de rajouter un récepteur… Je décide donc de tester cette nouvelle gamme en conditions réelles en me glissant dans la peau d’un fournisseur de contenu, histoire de vérifier la validité d’une telle solution…
Avec ou sans récepteur ?
Dans cette nouvelle gamme MoveMic, Shure propose les MV-One et MV-Two, deux ensembles comprenant un ou deux micros cravates fournis avec leurs accessoires, que l’on peut compléter ultérieurement avec le récepteur MV-Receiver. Afin de pouvoir tester tous les éléments de la gamme dans différentes configurations (smartphone, appareil photo, ordinateur, podcast audio) nous choisissons l’ensemble le plus complet : le MV-Two/Receiver Kit. Il comprend le MV Receiver, récepteur Bluetooth deux canaux avec tous les connecteurs nécessaires ainsi que deux micros cravates sans-fil avec leur bonnette en mousse ainsi que le coffret de recharge. Le tout est livré dans une pochette de protection néoprène qui permet de protéger et transporter les deux émetteurs avec leur chargeur, le récepteur, ainsi que les trois câbles inclus : minijack stéréo pour les appareils photos, USB-C pour les téléphones Android et les ordinateurs et un convertisseur USB-C vers Lightning pour les iPhones.
Déballage
La première chose qui saute aux yeux, c’est la compacité des petits micros MV : environ cinq centimètres de long pour un centimètre et demi de large, sachant que l’émetteur Bluetooth est inclus dedans. Le tout adopte un look qui fait plutôt penser à une petite pince à linge HighTech qu’à un petit émetteur. Rien à redire, l’ensemble est facile à clipper. À l’image, il se montrera certes un peu plus imposant qu’un micro cravate standard, mais plus discret que les formes carrées ou rectangles généralement adoptées par les systèmes concurrents qui sont en outre moins faciles à placer. En pratique, cela signifie également qu’il n’y plus de câble à gérer sur la personne équipée, ce qui simplifie les choses. L’autre avantage, c’est la réception directe de l’audio sur le smartphone iOS ou Android, sans avoir besoin d’y fixer un récepteur.
Alors, la liberté ? Pas tout à fait, car pour bénéficier de cette liaison directe, il faut obligatoirement utiliser un smartphone et utiliser l’une des deux applications développées par Shure : Motiv Audio ou Motiv Video, les deux app gratuites développées pour Android ou iOS qui permettent de contrôler jusqu’à deux micros MoveMic. On pourra alors produire des fichiers audio ou vidéo directement sur le smartphone voire assurer une transmission Facebook Live ou YouTube tout en gardant un smartphone léger et maniable. Les utilisateurs de stabilisateurs vont adorer !
Bloc note et podcast audio
Avant de démarrer le test, je télécharge les deux applications proposées par Shure : Motiv-Audio et Motiv Video. Je choisis la première pour me concentrer sur l’audio, car en effet, en tant que journaliste travaillant pour la presse écrite, j’ai parfois besoin d’un bloc note audio pour enregistrer mes interviews afin de les transcrire ensuite, donc pourquoi pas remplacer mon enregistreur de poing vieillissant par mon smartphone augmenté d’une paire de MoveMic afin de voyager un peu plus léger ?
La mise en route est assez simple : il suffit de sortir les deux petits micros du coffret qui fait également office de recharge et démarrer l’appairage initial en appuyant précisément quatre secondes sur l’unique bouton dont ils sont dotés. Ils apparaissent alors automatiquement dans l’app qui permet de surveiller des paramètres comme l’autonomie de la batterie ou la qualité de réception, mais surtout de régler le niveau audio. Les plus curieux pourront en prime accéder à un ensemble de traitements audio : filtre coupe-bas, compresseur, égaliseur graphique et réducteur de bruit dont l’utilisation peut être facilitée grâce à deux préréglages baptisés « mode chant » et « mode voix parlée ».
En ajoutant juste un connecteur spécifique Lightning-minijack, je peux connecter un casque pour contrôler le son, mais la latence observée est alors trop importante pour garder le casque sur les oreilles pendant toute une séance d’interview.
Après réalisation de quelques enregistrements, la comparaison avec les micros internes de mon iPhone 13 mini est sans appel : les petits MoveMic apportent plus de présence, de proximité et de constance. D’autre part, l’utilisation du compresseur et éventuellement de l’égalisation combinées à celle du réducteur de bruit est à la fois simple et pertinente pour les utilisateurs qui ne souhaitent pas passer par l’étape du mixage. La voix gagne ainsi facilement en présence et les bruits de fonds constants type ventilation ou réverbération de pièce sont supprimés de façon radicale.
Au-delà du bloc note, avec un smartphone et un ou deux MoveMic suivant les besoins, il est parfaitement envisageable de publier des interviews ou des podcasts de qualité. Je choisis de poursuivre les possibilités d’enregistrement audio en utilisant cette fois le MV Receiver en tant qu’interface audio, car en effet, une fois relié en USB, le petit récepteur Shure peut transmettre le son directement en numérique à l’ordinateur. Sur mon MacBook, le récepteur est effectivement reconnu par Mac OS où il apparaît sous l’appellation MV-R. Le Core Audio de Mac OS reconnaît alors deux entrées et deux sorties que je peux immédiatement utiliser dans Pro Tools ou Reaper. Voilà une autre manière de réaliser un podcast facilement, comme si on disposait d’un micro USB avec retour casque…
Tournage avec Motiv Video
Les premiers contacts avec l’application Motiv Video montrent que les concepteurs ont favorisé la simplicité d’utilisation. L’exposition, la mise au point et la balance des blancs, tout est automatique, même si on peut tout de même ajuster la valeur de l’exposition auto, afficher un damier ou encore changer d’objectif en passant sur le grand angle si le smartphone en est équipé. La dernière mise à jour donne un choix plus étendu en matière de résolution vidéo (720, 1080p et 4K), de cadence (24, 25, 30, 50 et 60 images/seconde) et de codec audio (PCM 16/48 kHz, Alac Apple Lossless ou à AAC de 96 à 256 kbit/sec).
La réception du son reste stable jusqu’à une vingtaine de mètres, à condition que l’interviewé reste face à la caméra, ce qui se montre à l’usage largement suffisant dans la plupart des situations courantes. À l’usage, le smartphone associé au micro MV est simple à utiliser, rapide à mettre en place et efficace. La réduction de bruit est dans la majorité des cas intéressante, mais il faudrait tout de même pouvoir régler son intensité.
Enclenché pour une interview réalisée volontairement près d’un abris-bus, le traitement a bien réussi à gommer les bruits de moteur de manière impressionnante, mais l’isolement ainsi obtenu est presque trop important par rapport à l’image et des artéfacts audio se font entendre. Le résultat final manque de naturel et le même constat s’imposera lors d’une interview filmée dans un bar… Sur la partie vidéo, le manque de contrôle pourra rebuter les utilisateurs qui aiment garder la main sur des paramètres comme la balance des blanc, l’ouverture ou les Iso, des possibilités qui restent le point fort d’applications vidéo tierces comme Filmic Pro ou Blackmagic Cam. Il faut alors passer par le MV Receiver qui assure la réception et le contrôle des petits MoveMic.
MV Receiver à la rescousse
Pour fixer le MV Receiver, je choisi de glisser mon iPhone dans un adaptateur pour trépied (non fourni) afin de disposer au moins d’un emplacement permettant de recevoir le sabot de fixation inclus dans le pack, mais j’aurai également pu faire appel à l’une de ces nombreuses cages spécial smartphones. L’ensemble devient alors sensiblement plus lourd et perd en maniabilité car ce récepteur a beau être compact, il fait son poids et se montre tout de même plus imposant que ses concurrents directs estampillés Røde ou Saramonic.
Heureusement, dès la connexion du raccord USB-C Lightning livré avec le kit MV Two, le récepteur est rapidement reconnu quel que soit l’app vidéo utilisée. D’autre part, on récupère une sortie casque indépendante, quasi sans latence, avec un niveau correct ainsi que des réglages de monitoring casque comparables à ceux d’une caméra : canal 1 à gauche, canal 2 à droite ou un mélange des deux sur les deux canaux. Dans les menus du récepteur organisés en trois sections, on trouve facilement ce dont on a besoin : niveau de casque, niveau de sortie ligne ou micro pour envoi en minijack vers un appareil photo, tout est prévu. L’alignement et l’utilisation du MV Receiver avec mes appareils photo Sony et Canon se fera d’ailleurs sans difficultés.
Notons que les micros peuvent au choix être envoyés séparément sur chaque canal ou mixés sur les deux canaux, ce qui peut être utile si l’on ne passe pas en postproduction, dans le cadre d’un live sur FaceBook par exemple. Enfin, pour ceux qui ont peur de saturer leurs enregistrements par mégarde, le MV Receiver propose comme sur certaines caméras, un mode Safety Track qui envoie un mix des deux sorties à un niveau inférieur paramétrable (-3, -6,-12 dB).
Vraiment sans fil
Pourvu que l’on accepte les limitations des applications Shure, les petits MoveMic représentent actuellement la seule solution pour smartphone vraiment sans fil, puisqu’aucun câble n’est nécessaire tant au niveau des émetteurs que des récepteurs. Au quotidien, pour le podcast ou le tournage vidéo léger, la solution Shure se montre en outre vraiment facile à vivre avec de surcroît des traitements audio intéressants.
Malgré tout, Shure pourrait encore gagner en attractivité en améliorant certains points comme le contrôle de la réduction de bruit parfois trop audible, ou les fourrures anti-vent non incluses dans les packs. On imagine que les utilisateurs experts de smartphone souhaiteront quant à eux que des app vidéo telle que Filmic Pro ou Blackmagic Cam deviennent compatibles avec les MoveMic, un développement qui selon nos sources pourrait voir le jour…
Chargement et autonomie
Le coffret fourni avec les MV One et MV Two sert à la fois au rangement ainsi qu’à la recharge autonome des deux émetteurs, un système d’aimant les gardant en place et garantissant le bon contact nécessaire à l’opération. Le voyant visible à l’extérieur du coffret renseigne sur l’état de charge, sachant qu’une fois les voyants au vert, on bénéficie d’une autonomie de sept à huit heures tandis que la batterie intégrée dans le coffret peut assurer jusqu’à trois charges sans avoir besoin du secteur ou d’un ordinateur…
Shure customise le Bluetooth et optimise ses capsules
« Nous voulions offrir à nos clients deux canaux audio de haute qualité directement sur le téléphone sans utiliser de récepteur », explique Mike Nagel, directeur associé – product management, « et la seule façon d’y parvenir était de créer notre propre protocole, unique et en instance de brevet ». Pour sa gamme MoveMic, Shure a donc développé sa propre technologie baptisée MoveMic Proprietary Wireless Software. D’autre part, les ingénieurs de Shure ont également planché sur la conception acoustique des micros Lavalier MoveMic qui selon le constructeur favorise un léger pic de présence situé entre 2 et 6 kHz afin d’améliorer l’intelligibilité et la clarté de la voix…
Article paru pour la première fois dans Mediakwest #57, p. 42-45