Amoureux du film de genre, fatigués de ne pas trouver dans les recommandations des sites généralistes le dernier slasher ou un Giallo kitsch qui fera votre soirée ciné pop-corn, c’est à vous que s’adresse Shadowz. Tarif mensuel : 4,99 euros.
En octobre 2013, quand Vivendi décide d’externaliser une partie de ses activités, Julien Vin-Ramarony et Aurélien Clerc sont à la direction des contenus de SFR. Ils créent alors VOD Factory, et reprennent l’édition de la VOD du fournisseur d’accès. SFR entre à 40 % dans le capital de leur jeune société. Puis, elle grandit et édite d’autres offres en OTT, dont celle de la Fnac. « Nous sommes des spécialistes de la SVOD à toutes ses étapes : de l’acquisition, en passant par le marketing de l’offre », explique Aurélien Clerc, directeur général de VOD Factory.
Toucher les communautés avec des offres ciblées
En 2018, à la fin du contrat, SFR sort du capital de la société qui pivote alors autour de trois activités. La première se traduit par le développement d’une plate-forme, OTTO, destinée à proposer de la SVOD en marque blanche. « Un de nos métiers est de mettre cette plate-forme à la disposition des personnes qui ont des contenus à monétiser (clubs de football, fédérations de sport, conférenciers, etc.). En quelques semaines et quelques milliers d’euros, ils peuvent ainsi créer leur Netflix sur mesure », détaille-t-il.
Autre pilier sur lequel repose la stratégie de VOD Factory : apporter aux opérateurs les meilleures offres OTT du marché. « Notre but est de monétiser des offres modernes, répondant aux nouvelles formes de consommation des abonnés de ces FAI, qui se détournent des bouquets de chaînes proposés par ces opérateurs. Nous avons déjà signé un deal de distribution avec un opérateur télécom », ajoute-t-il.
Enfin, le troisième axe vise à lancer des offres OTT « maison », grâce à l’outil qu’est la plate-forme OTTO. VOD Factory souhaite répondre à un manque et s’adresser à des communautés via des offres de SVOD très ciblées, marketées. Citons QueerScreen, une offre de cinéma et de séries LGBT, Spicee (une offre de documentaires en OTT, dont VOD Factory a pris 51 % en 2017) et bientôt de Shadowz. « Notre but est de proposer une dizaine d’offres OTT dans les prochaines années. Nous croyons qu’à côté des sites de SVOD généralistes, il existe une place pour les offres communautaires », reprend Aurélien Clerc. Pour ce faire, il est indispensable de bien identifier la communauté, de bien construite l’offre et surtout de déclencher l’envie de payer les contenus premium dans ces niches. « Notre stratégie est de créer des offres où des spécialistes parlent aux spécialistes », détaille-t-il.
Si créer une offre OTT ne semble pas plus compliqué que cela pour ces spécialistes, encore faut-il qu’elle soit identifiée dans le flot actuel des propositions de SVOD. L’enjeu est de taille. « Il y a deux voies pour le marketing : identifier les bons influenceurs, leurs communautés, leurs sites préférés… C’est coûteux, mais quand on s’adresse à une niche bien identifiée, c’est in fine assez simple. La seconde direction réside dans une volonté d’hyperdistribution. »
Shadowz sera ainsi disponible via les fournisseurs d’accès, les consoles de jeux, etc. C’est en se penchant sur la communauté des amateurs de films de genre que l’idée de Shadowz a germé. Après une campagne de crowdfunding qui a explosé toutes les prévisions (365 % de réussite et près de 37 000 euros récoltés), l’offre OTT est en cours de peaufinage, s’inspirant de Shudder, le site américain.
Un million d’amateurs de films de genre en France
« Nous pensons qu’il y a en France une communauté très forte, amatrice de films de genre, avec des réalisateurs qui ont du mal à faire entrer leurs films dans les salles. Et pourtant, ce sont les plus importantes ventes de DVD et en VOD. » Tout va être réalisé en interne, grâce notamment à Christophe Minelle, en charge du marketing, et passionné de ces cinématographies. De plus, par ses expériences passées, VOD Factory est déjà en contact avec les ayants droit et distributeurs de ce type de catalogue. La ligne éditoriale va se ventiler entre des films de différentes nationalités, récents et plus anciens.
« L’économie est telle que c’est compliqué d’avoir les gros films face à Netflix, mais nous espérons proposer un catalogue riche et complet, éditorialisé, contextualisé afin de répondre au mieux aux envies des fans », souligne-t-il, ajoutant que Shadowz est la première offre de SVOD lancée par VOD Factory seul, sans coéditeur. « Nous achetons les droits, réalisons le marketing, le rédactionnel, etc. En revanche, nous voulons nous appuyer sur des partenaires médias, des influenceurs. C’est en cours », précise Aurélien Clerc.
Côté films, la plate-forme a déjà signé des accords de distribution avec une vingtaine d’ayants droit, sur des durées courant de huit mois à deux ans. « Nous aimerions un jour aller vers la coproduction. Nous avons déjà pris tous les droits de quelques films inédits, qui seront labélisés Shadowz. C’est une première étape, mais nous restons prudents et modestes. Aujourd’hui, les 150 films sur la plate-forme sont des acquisitions. Nous attendons de voir comment va être accueilli Shadowz par la communauté », sourit-il. En France, près d’un million de personnes ont une appétence pour le film de genre selon son estimation. « Si nous avons dix mille abonnés à 4,99 euros dans les douze prochains mois, nous serons contents », conclut Aurélien Clerc.
Article paru pour la première fois dans Mediakwest #36, p. 84-85. Abonnez-vous à Mediakwest (5 numéros/an + 1 Hors série « Guide du tournage) pour accéder, dès leur sortie, à nos articles dans leur intégralité.