Sony / Sony Pictures rêve à un monde en Full 4K

 
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MediaKwest a eu la chance de faire un voyage à Los Angeles/Culver City en compagnie de Sony. Le but de la manœuvre était très simple : montrer aux journalistes l’étendue de la chaîne de production en 4K, depuis le tournage jusqu’à sa version « domestique », la bien nommée Ultra HD, en passant par la diffusion numérique en salle… Nous avons passé quelques jours en compagnie des techniciens américains, en grande forme, qui se sont livrés à un show en très haute définition ! Ce papier est le premier d’une série d’articles consacrés à Sony, à Sony Pictures et à leur vision commune du futur.

Nous avons suffisamment bourlingué dans la profession depuis des lustres pour être désormais à même d’établir des parallèles entre ce que Sony nous a fait vivre à Los Angeles au mois d’avril 2013, et ce qu’il avait déjà entrepris des années auparavant avec la 3D, et encore avant avec l’explosion de la haute définition dans les années 2000. Sans aller jusqu’à parler d’un calque d’un lustre à un autre, Sony a décidément toujours eu de la suite dans les idées. Contrairement à tous les fabricants de l’acabit de Samsung ou LG, Sony a pour particularité d’être à la fois un créateur de programmes, un concepteur de matériels de captation et de post-production, et un fabricant de matériels de diffusion, qu’ils soient professionnels ou grand public. Le géant nippon sait parfaitement en user et en abuser, et sait également comment jouer de diplomatie pour rallier à son étendard d’autres studios hollywoodiens, voire d’autres constructeurs nippons ou coréens.

Concernant Sony Pictures, il est indéniable que le studio a toujours servi de laboratoire technique à Sony. Pour ceux qui ne le sauraient pas, Sony faisait partie des précurseurs du mastering haute définition il y a de cela plus de 20 ans, mastering qu’il affichait déjà fièrement sur les jaquettes des LaserDiscs de l’époque. Puis est venu le boum du DVD, et sur ce point encore, Sony Pictures US a créé une véritable cellule d’Authoring et de prémastering ultra performante que nous avions visitée à de nombreuses reprises. Mais c’est réellement avec l’enjeu du Blu-ray Disc que Sony Pictures a montré l’étendue de son aura et de son « pouvoir » en tant que décisionnaire de son propre futur et de celui des autres. La déconfiture du HD DVD a été pour Sony une très grande victoire sur son concurrent Toshiba. Le studio, ainsi que l’entité hardware japonaise, avait joué des coudes afin d’imposer le Blu-ray à Hollywood, et rallier notamment à lui le géant Warner. Bref, tout cela pour vous dire que l’histoire de Sony/Sony Pictures est parsemé de coups de force et de révolutions qui ont marqué l’industrie du cinéma, de la vidéo et des matériels grand public.

Same player shoot again !

Nous voici en 2013, et Sony repart en croisade afin d’imposer au monde entier le « 4K ». Et croyez-nous sur parole, l’entité met la gomme, et pas qu’à moitié. Si les professionnels qui nous lisent connaissent parfaitement le 4K, Sony / Sony Pictures se fait fort de faire pénétrer cette définition pointue dans le grand public par la voie royale des téléviseurs Ultra HD en 3840 x 2160 pixels. Mais ce n’est pas tout. Sony n’est vraiment pas seul sur le coup, car il a à ses côtés les cadors du secteur en les personnes de Samsung, Toshiba, Panasonic, LG, Sharp, Visio et Hisense. Ces géants du secteur de l’industrie sont en effet en cours d’introduction de modèles Ultra HD (parfois libellés « 4K ») dans le grand public, ainsi que dans le secteur pro. Comme à son habitude, Sony compte bien jouer à Monsieur Loyal en devenant le moteur du 4K, comme il l’a été de façon quasi historique sur la haute définition (et le Blu-ray). L’histoire se répétera-t-elle ?… Quoi qu’il en soit, Sony est persuadé de pouvoir calquer toute sa politique de marketing et de communication déjà bien rodée avec la HD et le 2K, sur le lancement et la promotion du 4K en tant que chaîne de production complète. Pour ce faire, il compte établir une chaîne de production totale depuis le tournage jusqu’à diffusion domestique, basée sur le 4K/Ultra HD. Il voit sa position confortée par diverses annonces provenant de YouTube, NetFlix, RED et KBS, tous enclins à plonger dans le grand bain du 4K en version intensive.

Sony n’est pas seul et compte porter haut l’étendard du 4K.

Lors de nos discussions avec les professionnels de Sony Pictures à Culver City, il nous a paru évident que Sony conversait énormément avec les autres studios hollywoodiens afin que le 4K devienne le standard majeur et indétrônable qui en fera la norme actuelle gravée dans le marbre. Sony Pictures appuie déjà sa communication sur les Oscars 2013, car sur 14 films ayant reçu des récompenses ou ayant été nominés, 7 ont bénéficié d’un travail en 4K (tournage en 4K ou transfert de la pellicule en 4K supervisé par Sony Pictures).

L’univers 4K selon Sony se divise en cinq parties : l’acquisition (le tournage), la production (incluant évidemment le dé-rushage, la post-production et les trucages), la distribution en salle (quel que soit le moyen numérique), la diffusion en salle via les projecteurs 4K et, enfin, le point sensible, le home cinéma des particuliers en version Ultra HD/4K. Si une partie de la chaîne est bel et bien existante, la diffusion domestique des signaux Ultra HD reste encore incomplète, faute de sources réelles et d’une évolution du Blu-ray sur laquelle nous allons revenir dans d’autres papiers sur MediaKwest. Au fil des heures passées chez Sony Pictures, ce que nous avons ressenti en tant que journalistes, est que Sony compte bien rallier à lui le maximum de poids lourds de l’industrie afin de faire grossir rapidement le marché du 4K, tant dans le tournage des œuvres que dans la diffusion en salle et à domicile. La machine semble être en marche.

Les intervenants sur place à Los Angeles se sont d’ailleurs, à maintes reprises, basés sur l’œuvre-étendard The Amazing Spider-Man afin d’asseoir leurs discours sur l’avenir du cinéma et du home cinéma de Monsieur et Madame tout le monde. Plans sur la comète ? Pas vraiment. Tout le monde est très sérieux, croit de façon indéfectible que l’univers va virer de la HD vers le 4K à la vitesse de l’éclair, et compte bien s’en donner les moyens. La seule inconnue : le temps que cela prendra.

La stratégie : construire l’intégralité de la chaîne 4K, de façon plausible et universelle, mais pour l’heure, il y a un trou d’air concernant les sources.

L’avantage, quand on s’appelle Sony, c’est qu’on a la possibilité de vivre littéralement en autarcie, du moins si on le souhaite. Fabricant de caméras 4K (formidable F65), de moniteurs 4K et d’unités de post-production en 4K, Sony Pictures a, dans sa gibecière, toute l’armada de matériels qui permet de concevoir une œuvre en 4K, qu’elle soit en 2D ou en 3D. Ça, c’est pour le contenu. Sony affirme d’ailleurs qu’il va mettre la gomme sur la création de ces fameux contenus en 4K/Ultra HD. Fabricant de projecteurs 4K destinés aux salles de cinéma, Sony a lié de tendres relations avec la chaîne de cinémas américaine AMC, qui connaît un beau succès outre-Atlantique. Il se sert justement cette chaîne de cinémas afin de promouvoir le 4K au travers de tous les États-Unis. Il entre évidemment concurrence directe avec ses petits copains de Christie et Barco. Selon les propres mots de Sony Pictures sur place, le premier projecteur cinéma Sony en 4K a été lancé en 2006. À l’heure de nos propos, 25 % du parc des projecteurs 4K aux USA appartient aux modèles Sony/SXRD. Le fabricant parie également sur un accroissement de ses parts de marché dans les mois et années à venir, fruit notamment de cet accord avec les cinémas AMC. De toute façon, les équipes sur place ont résumé la situation : « le 4K, c’est du 35 mm en numérique. Le 8K, c’est du 65 mm en numérique ». Voilà, fin de l’histoire, la messe est dite.

Il y a dans les discours des techniciens rencontrés sur place une volonté évidente, non pas de mettre à mort la pellicule, mais d’assurer l’évolution des images vers une définition 4K standard, qui permettrait justement d’accompagner le déclin de la pellicule tout en trouvant un avantage réel à créer une chaîne de production et de diffusion complète dans un standard unique. Ce standard unique sera bien sûr décliné en Ultra HD pour le grand public. En résumé : on tourne, on assure la post-production, et on diffuse dans un même standard sur une chaîne qui part de la lentille de la caméra jusqu’au téléviseur et aux vidéoprojecteurs du grand public, en passant par la diffusion en salle de cinéma en 4K pro (4096 × 2160 pixels). Dans la série « I Had a dream », celui de Sony est clair. Et c’est d’ailleurs ce qui ressort de notre voyage et de nos conversations avec les techniciens. Il n’y a aucune faille dans le discours sur place, on a carrément l’impression que Sony veut imposer rapidement toute une chaîne 4K qui lui paraît d’une évidence ostentatoire. Ce que nous avons également observé, et cela risque de ne pas faire plaisir à tous nos lecteurs, c’est que la barrière qui sépare désormais le secteur pro du secteur grand public est de plus en plus mince. Sous les trois à cinq années à venir, les particuliers pourront donc avoir accès de façon massive à des images issues de Master 4K, diffusées en 3840 × 2160 pixels (Ultra HD). Sachez également que la mise en vente des premiers téléviseurs Ultra HD est effective, nous préparons d’ailleurs un reportage sur ce que nous avons vu à Tokyo dans les magasins (modèles TV Ultra HD Sharp, LG et Sony, libellés 4K pour certains). La machine est donc en route, et si les prix de ces matériels sont évidemment très élevés (de 8 à 20 000 $) il existe déjà des marques chinoises qui annoncent des téléviseurs Ultra HD aux environs de 2 500 à 3 000 € pour la fin de l’année 2013. Il reste évidemment à régler le problème du trou d’air caractérisé par l’absence de sources. Sur ce point, Sony n’a pas réellement donné de réponse aux journalistes, pas plus sur l’évolution du Blu-ray que sur le développement d’une plate-forme de téléchargement Sony Pictures en Ultra HD. Mais nous sommes persuadés que tout cela est dans les tuyaux (texte écrit début mai 2013).

En conclusion de ce premier chapitre :

L’histoire se répète donc. Après avoir joué un rôle important dans la promotion de la haute définition, du DVD, du Blu-ray et du cinéma numérique, Sony rêve d’un monde au standard unique : le 4K/Ultra HD. Il s’en donne les moyens grâce, notamment, à l’appui de Sony Pictures et des professionnels du cinéma, qu’il compte bien rallier sous son étendard, tous studios confondus. En tant que fabricant de matériels professionnels et grand public, Sony a en effet tout intérêt à voir cette chaîne 4K/Ultra HD se construire de façon cohérente et rapide, lui assurant ainsi la vente de téléviseurs Ultra HD, qu’ils soient LCD ou OLED. Ce qui ressort également de nos conversations avec les professionnels à Los Angeles, est que la barrière entre le secteur pro et le secteur grand public devient de plus en plus « fine » au fil des années.


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