Ziad Lammam, vice-président de Teradici, nous a reçus chez lui, à 8 000 km de Paris, virtuellement évidemment !
Pouvez-vous nous dresser un rapide historique de votre société ?
Depuis 2004, nous sommes un éditeur de logiciels professionnels pour le pilotage à distance de solutions informatiques. Nous avons accompagné l’évolution des technologies matérielles vers la virtualisation avec un investissement conséquent dans l’étude des workflows multi-cloud et hybride. Nous avons développé, il y a de nombreuses années, le protocole PC sur IP (PCoIP) et poursuivons son amélioration. Nous sommes bien implantés dans les industries graphiques « hautes performances » en particulier dans le monde des médias et du divertissement.
Notre technique d’encodage répond aux besoins des utilisateurs les plus exigeants, que ce soit pour les VFX, la diffusion ou le montage, comme l’illustre notre partenariat avec Avid. Nous avons consacré beaucoup d’attention à la qualité de notre algorithme d’encodage pour assurer celui des pixels, sans perte et de manière sécurisée. Nous utilisons le cryptage AES 256 et prenons en charge les technologies MFA (multi-factor authentification). Le protocole PCoIP de Teradici assure la fidélité colorimétrique des images et graphiques et permet de délivrer des flux vidéo jusqu’à la résolution 4K à haute cadence.
Nous supportons certains périphériques, dont les tablettes Wacom, appréciées des artistes numériques. La compression est effectuée au niveau de l’hébergement, les utilisateurs utilisant des terminaux « clients ». La solution est supportée sur des clients légers, des « zéro clients », des ordinateurs sous Mac, Windows, Linux, ou des solutions mobiles comme les tablettes. Le logiciel Cloud Access Software est également en charge de la gestion de l’ensemble des machines virtuelles déployées dans un cloud public ou dans un data center sur site. L’encodage, la compression, l’encryptage et la gestion de l’ensemble des terminaux finaux : tout est pris en charge par notre logiciel.
Où est située votre entreprise ?
Le siège social de Teradici, ainsi que l’ensemble de nos équipes R&D, sont basés au Canada, à Vancouver (Colombie-Britannique). Notre présence est forte dans les plus grandes entreprises mondiales spécialisées de l’univers des médias et de l’entertainment. Nous sommes également présents dans de nombreux autres secteurs.
Combien de personnes travaillent dans votre entreprise ?
160 personnes. La majorité de notre effectif est dédié à la R&D. Nous disposons également d’un important service support utilisateur, ainsi bien sûr que d’une équipe marketing et gestion de produits.
Comment sont commercialisées les solutions Teradici ?
Nous distinguons deux types de commercialisation. Nous travaillons avec de nombreux partenaires, des clouds publics tels qu’AWS, Microsoft Azur, Google Cloud, des partenaires OEM comme Dell, HP et LG, des éditeurs Media comme Avid ou Adobe et des partenaires technologiques comme Nvidia, AMD et Intel. Les utilisateurs peuvent également acquérir le logiciel Cloud Access Software par le biais d’un de nos revendeurs. Nous proposons pour nos partenaires une version customisable de notre logiciel à l’aide de SDK (kits de développements) et d’API (interface de programmation d’application). Avid Edit-On-Demand en est la parfaite illustration. Comme de nombreux partenaires, Avid appartient au « Teradici Advantage Partner Program ».
Vous revendiquez une grande fidélité colorimétrique. Comment y parvenez-vous ?
Très bonne question ! Il existe de nombreuses méthodes pour compresser les pixels, la plus célèbre étant vraisemblablement la compression vidéo H-264, dont nous apprécions tous la qualité lorsque nous regardons Netflix. C’est très adapté à la vidéo, mais les images haute-résolution et les graphiques nécessitent des techniques de compression différentes. C’est pour cela que les technologies PCoIP et PCoIP Ultra exploitent intelligemment plusieurs encodeurs pour procurer la meilleure expérience utilisateur possible en identifiant le type des contenus affichés à l’écran et leurs emplacements. Des codecs sont dédiés à la vidéo, d’autres préservent les couleurs, la précision et la qualité du texte.
Lorsque vous observez des textes sensiblement flous dans un jeu vidéo, c’est que l’encodage est effectué sur la globalité de l’image. Notre technologie d’encodage ne perd aucun pixel et aucune couleur ; la fidélité est garantie des deux côtés de la solution.
Nous travaillons avec des partenaires comme Nvidia pour garantir le meilleur usage de notre technologie d’encodage ou d’encodeurs matériels qui peuvent être disponibles sur le GPU. Le CPU ou le GPU encodent les pixels et acheminent les informations jusqu’au client à travers le réseau. Le terminal client décode les informations, la technologie PCoIP est efficace aux deux bouts de la chaîne : l’encodage du côté hôte et le décodage du côté client.
Quel type de compression autre que H-264 utilisez-vous ?
C’est une technologie propriétaire qui rend notre produit si unique : nous avons développé nos propres compressions pour les différentes zones de l’image et l’offre a été récemment complétée pour permettre l’utilisation de la compression standard H-264. Cela fait partie de notre partenariat avec Nvidia.
Comment gérez-vous la sécurité des médias ?
Il y a deux aspects : la sécurité technique et la conformité aux normes. Du côté technique, nous ne transmettons jamais de données vers le terminal de l’utilisateur, uniquement des pixels hautement sécurisés via l’encryptage AES-256. Aucune information n’est présente sur le client local, tout est sécurisé dans le cloud ou le data center : c’est notre principal mécanisme de sécurité.
Nous avons développé un terminal sécurisé très populaire qui sert uniquement au décodage, le PCoIP zero client. Il n’y a alors littéralement aucun moyen de stocker des données sur le terminal, aucun disque dur. Pour augmenter encore la sécurité, nous supportons l’authentification multi-facteurs. Nous travaillons avec les différents groupes de sécurité et les studios pour nous assurer de répondre aux critères des normes TPN et MPA pour les artistes.
Quelle bande passante informatique est nécessaire pour une expérience utilisateur satisfaisante et une bonne qualité d’image ?
Cela dépend de la résolution, du nombre de moniteurs et également de ce qui change vraiment sur votre écran. Le protocole est intelligent : nous ne transmettons que les pixels qui évoluent pour économiser la bande passante qui peut varier de 10 à 100 Mb/s au maximum. Si la bande passante disponible diminue, le protocole a la capacité de mesurer le réseau et d’adapter la qualité automatiquement.
Comment gérez-vous les configurations typiques en postproduction avec un moniteur de retour vidéo ?
Vous parlez du troisième moniteur ? Typiquement c’est aujourd’hui un cas d’usage qui reste géré avec une machine locale dans de nombreux cas, mais nous proposons des solutions adaptées. Une machine locale peut être utilisée sur le site du client et télécommandée par notre carte dédiée aux stations de travail (remote workstation card technology).
Comment les utilisateurs envoient-ils leurs médias et autres données vers les stations de travail ?
Nous supportons les périphériques USB. Les administrateurs ont la possibilité de bloquer les accès pour éviter les virus, malware et fuites de données.
Comment se concrétise l’offre proposée par AWS via vos outils ?
Nous entretenons un partenariat de longue date avec Amazon AWS qui commercialise une offre destinée au monde des médias et une solution « desktop as a service ». Il y a six ans, le protocole Teradici a été sélectionné pour leurs solutions ; AWS utilisant une version customisée de notre logiciel Cloud Access Software. L’offre est principalement employée à travers le monde par les utilisateurs bureautiques VDI (Virtual Desktop Infrastructure) mais l’équipe AWS Media & Entertainment propose une solution plus haut de gamme pour ce marché. Le logiciel Cloud Access Software est disponible en commercialisation directe pour une installation physique sur les sites des utilisateurs ou via le « marketplace » AWS.
Trois options sont alors proposées : Amazon workspaces pour les utilisateurs « bureautique » recherchant une solution simple et rapide, une seconde solution très légère sans installation, proposée en location horaire et la solution haut de gamme adaptée pour l’univers media & entertainment via le déploiement sur une des instances ec2 d’AWS telle que G3 ou G4. Cette solution permet à l’utilisateur de choisir ses CPU et GPU. Le logiciel Cloud Access Software peut être hébergé sur Windows ou Linux, Apple n’offrant actuellement pas de solution de virtualisation.
Pouvez-vous nous détailler votre partenariat avec Avid ?
Avid a reconnu très tôt l’importance d’un portage dans le cloud des solutions de montage. Nous sommes partenaires depuis environ deux ans pour assurer le bon fonctionnement d’Avid Media Composer dans un environnement virtualisé en utilisant le protocole PCoIP. Précédant l’arrivée du Covid-19, le « timing » était très bon. Avid était ainsi préparé pour accompagner ses clients à déployer leurs stations de montage dans le cloud. De nombreux utilisateurs apprécient notre solution qui ne nécessite pas l’installation d’un VPN, grâce à l’architecture moderne de notre solution de pilotage à distance IP. La sécurité est dans la passerelle.
Qu’est-ce qui explique la différence de qualité entre votre solution et celles de vos concurrents ?
Principalement la flexibilité ! Certaines solutions peuvent être très bonnes sur site, d’autres dans le cloud ; rares sont les solutions qui fonctionnent aussi bien dans les deux configurations. Nous sommes persuadés de l’intérêt d’un environnement cloud hybride et nous assurons du bon fonctionnement de notre logiciel dans le cloud ou dans un data center.
Pouvons-nous évoquer les tarifs ?
Il y a deux niveaux : Cloud Access et Cloud Access Plus pour les utilisateurs ayant des besoins graphiques évolués. Le prix liste de Cloud Access Plus est de 240 $ par an, avec une réduction pour un achat sur plusieurs années. Le produit est également disponible via le marketplace AWS et d’autres marketplaces de cloud public sur un modèle de location horaire.
Quelles sont vos dernières évolutions ?
De très grandes évolutions sont apportées par le protocole PCoIP Ultra pour répondre aux attentes des artistes. Ultra permet de plus hautes résolutions et cadences, la visualisation des couleurs 10 bits et l’utilisation des GPU pour des performances supérieures.
Extrait de notre dossier « Postproduction & Cloud » paru dans Mediakwest #37, p. 82-102. Abonnez-vous à Mediakwest (5 numéros/an + 1 Hors série « Guide du tournage) pour accéder, dès leur sortie, à nos articles dans leur intégralité.