Un mur Led légèrement incurvé permet une plus grande immersion dans les images en arrière-plan. Les logos et le graphisme en premier plan ajoutent à cet effet. © DR
La production a consisté à accompagner la tranche 19h/21h des programmes de la soirée Arte. La volonté de la production et de la direction artistique a été de plonger les spectateurs dans un tour du monde de l’information, en servant de guide au travers des cinq programmes de la soirée (Arte Regards, 28 minutes, Le Dessous des Cartes, Arte Journal, Le Dessous des Images). L’idée d’utiliser un mur de Led s’est imposée très rapidement pour la direction artistique, car il permettait de projeter des panoramas et contextualiser, voire téléporter, le propos de l’animateur dans ce nouveau programme à 360°.
La société KM Production, qui produit le magazine 28 minutes tourné aux Studios Rive Gauche, a décidé de collaborer avec MultiCAM et DreamCorp qui est aujourd’hui l’une des seules sociétés à proposer un package robotisé et mur Led avec sa technologie Backdrop. Le 28 minutes est actuellement en tournage chaque après-midi aux Studios Rive Gauche. La production a souhaité mutualiser les moyens humains et techniques déjà mobilisés pour réduire les coûts de production. Il a donc été décidé de créer un deuxième plateau dédié au 19/21 pour un tournage avant le 28 minutes dans l’ancienne cantine. Les postes remote sont, pour leur part, présents directement sur le plateau de 28 minutes.
Deux cadreurs pilotent les trois caméras robotisées qui sont une Dolly courbe, une Dolly droite et une colonne télescopique. La première Dolly est utilisée en courbe pour s’enrouler autour de l’animateur et donner l’impression d’un large espace à 180°. La seconde, dédiée aux gros plans, est également en mouvements, sur rails droits. La dernière, est une colonne motorisée le « lift » au fond, collé au mur. Elle remplace un mouvement de grue qu’il aurait été impossible de faire rentrer dans l’espace, sans parler du coût supplémentaire.
Les deux cadreurs, avec chacun un pupitre de contrôle se partagent les trois robots et disposent d’un MultiCAM Pilot pour effectuer des rappels de mouvements de type Motion Control. Plus particulièrement le plan d’entrée pour plonger dans l’univers ou celui de sortie pour prendre de la hauteur. Le logiciel Pilot développé par MultiCAM gère la colonne qui a cinq types de mouvements programmés pour simuler des mouvements de grue. Sur le serveur Pilote, est présent le logiciel Tracker qui vérifie s’il y a des aberrations et si les caméras sont raccord par rapport à l’affichage 3D. Les caméras fournissent les données 3D qui sont récupérées par Tracker et renvoyées vers Backdrop qui est l’outil d’exploitation. Backdrop pilote la synchro des caméras et l’écran Led.
Installation dans des temps records
Le premier pilote a été tourné chez Pure View en février et avait été fait sur Unreal. Mais l’approche a ensuite évolué pour des raisons de simplicité de production, le studio XR a été déployé à Rive Gauche et le contenu a été redéveloppé sur Backdrop pour que ce soit plus simple à gérer. Deux jours d’installation pour le mur et un jour pour l’installation de la régie, un jour de tournage pour le pilote, ont été nécessaires. Il a fallu un peu plus de temps de calage technique. En effet, il faut faire communiquer des architectures qui ne savent pas forcément communiquer les unes avec les autres.
Le but étant de faciliter l’usage, ce projet a permis d’amener vers un projet plus broadcast. Il est possible de jouer avec la parallaxe sans aller dans Unreal. Il y a cinq plateaux « Pad » à livrer chaque jour une heure avant l’émission. L’émission zéro était compliquée à gérer car il fallait trouver des solutions pour s’adapter à l’infrastructure des studios qui est en 50i alors qu’il faut être en 50p pour les studios XR. Pour être indépendant, MultiCAM fournit la régie pour la partie du mur et la conversion se fait à la fin en 50i pour les Pad. Le plateau fait 50 m2 et la surface de Led fait 30 m2 et a été fourni par IVS.
La spécificité dans le dossier c’est qu’il a fallu revoir dans un délai très court le fonctionnement du Backdrop pour répondre à la problématique des news avec la gestion de différents calques d’habillage, puis importer facilement et assigner avec fidélité les contenus en motion design. Afin d’être en mesure d’ingérer dans un délai très court avec le minimum d’opérations les nouveaux éléments graphiques de la conduite de chaque journée, les équipes de MultiCAM et DreamCorp, partenaire dans le développement de la solution Backdrop, ont façonné l’outil pour l’adapter aux contraintes de la télévision. Plus particulièrement, la nouvelle fonctionnalité « V-Screens » permet de créer ces fameux calques dans l’espace pour les assigner a des contenus en motion design.
MultiCAM propose un accompagnement et une expertise de l’ensemble de la chaîne. Que ce soit sur la partie robotisation – en offrant un dispositif léger en mouvement continuel mais avec une grande souplesse de manipulation –, que ce soit sur la solution de diffusion en xR avec la prise en charge d’un workflow multicaméra. Facilement adaptable et opérable avec backdrop, le nouveau système de « Cues », développé spécialement dans le cadre du projet 19/21, permet d’enregistrer des presets et de jouer des transitions automatisées entre chaque Cue définissant une conduite. La préparation d’une émission par l’opérateur est réalisée en moins de 30 minutes avant tournage !
Au commencement, Arte a lancé un appel d’offres, souhaitant avoir une émission qui puisse lier les cinq programmes de la première partie de soirée. La difficulté étant que ces programmes ont leur propre identité. Le but était de donner du sens à l’habillage, le motion design en 3D devant refléter et rendre lisible la navigation au cœur de cette tranche 19/21, de créer une continuité temporelle. L’animation, les effets doivent être justifiés et tendre vers le même objectif. La 3D, les mouvements de caméra, les perspectives et la mise en scène servent le propos.
« Nous avons voulu créer un concept qui puisse à la fois avoir cette idée de neutralité mais aussi l’idée de faire voyager, d’emmener les téléspectateurs autour du monde. Imaginer ce projet autour d’un studio XR, c’est partir d’une page blanche, avoir une singularité visuelle, ne pas avoir la même image que certains journaux télévisés qui ont un décor très formaté. Nous voulons être dans le beau », indique Julien Deshayes, directeur artistique du programme et également DA du 28 minutes.
La totalité du programme repose sur l’utilisation de photos, de titres répartis dans la profondeur. La perspective de la scène affichée est synchronisée avec le point de vue de chaque caméra. Le décor virtuel en arrière-plan sert pour chaque lancement d’émission. Chaque plateau est illustré par un panorama du pays traversé par l’émission ou par le pays d’origine de l’émission. La terre est l’élément central et le seul élément en 3D, elle sert de lancement pour les différents programmes. Elle sert de fond neutre et effectue des rotations et affiche la zone globale concernée. Les éléments de charte graphique comme les frises chronologiques, les logos dans l’espace, les animations augmentent la sensation de profondeur et d’immersion.
Julien Deshayes a créé un book très complet, un mode d’emploi sur l’utilisation des visuels, des photos. Le rendu est très cinématographique, très élégant. « MultiCAM a fait un travail exceptionnel. Ils ont été capables de redévelopper certaines fonctions de Backdrop pour en faire un outil broadcast. Il y a énormément de potentiel, à terme nous pourrons avoir plus de 3D, mais l’idée est avant tout de servir le propos. Il a fallu inventer de nouvelles méthodes de travail, apprendre à travailler ensemble avec un outil qui est encore en développement. Le potentiel de la technologie XR est exponentielle et MultiCAM a écouté nos besoins et répondu à toutes nos demandes. »
La quotidienne a démarré le 11 avril et continuera jusqu’à la fin juin au moins. Pour le moment, rien n’est annoncé pour la saison prochaine mais Arte, semble-t-il, est ravi du résultat. Il y a donc tout à faire sur ce plateau. Nous en sommes au début…
Article paru pour la première fois dans Mediakwest #52, pp. 22-24
