Gratuite, sa version « de base » est totalement exploitable ; la version studio commercialisée au tarif de 269 € offre des fonctionnalités et des options haut de gamme.
Historiquement, la société Blackmagic a débuté son activité en tant que concepteur de matériel audiovisuel, principalement des cartes et des boîtiers d’interface entre les ordinateurs, les caméras et les écrans. L’offre s’est aujourd’hui considérablement élargie avec un écosystème très diversifié : caméras, solutions d’incrustation « fond vert » et de réalisation multi-caméras, diffusion live, mais également télécinéma, conversion, monitoring, routage et encodage.
Da Vinci Systems fut la première société acquise par Grant Petty, CEO de Blackmagic pour renforcer son offre. Spécialisée dans les solutions matériels et logiciels d’étalonnage et de restauration de film, Resolve était l’outil vedette de la marque, une solution basée sur l’accélération GPU qui a pris le nom DaVinci Resolve sous l’égide de Blackmagic. Dès son acquisition, le nouveau propriétaire de DaVinci a mobilisé une véritable armée de développeurs, chargée dans un premier temps de « redesigner » une interface utilisateur plus accessible. Une fois la première enclenchée, Blackmagic a enchaîné les vitesses supérieures à un rythme effréné : le passage de la troisième vitesse fut la création d’une station de montage, la quatrième, l’intégration de Fairlight, solution de travail audio acquise par la marque en septembre 2016, la cinquième l’ajout de Fusion pour les effets spéciaux. La surmultipliée a été passée avec la création d’une nouvelle page de montage simplifiée : Cut.
Dans les entrailles de la bête
Les premiers défis auxquels les têtes pensantes de Blackmagic ont été confrontées furent d’ordre technique. Initialement dédiée aux productions les plus prestigieuses, la solution était très puissante et qualitative dans le traitement des images, mais les stations de travail devaient alors être également solidement dimensionnées. Un travail d’optimisation impressionnant a permis de conserver les qualités de l’outil tout en augmentant sa fluidité de lecture, ce fût la seconde vitesse à passer avant d’accueillir les autres outils.
À l’image d’autres solutions telles que Final Cut Pro X d’Apple, DaVinci est développé autour d’une base de données. Même si tout a été mis en œuvre afin de simplifier le concept, cela reste le point qui étonne le plus les utilisateurs confrontés pour la première fois à DaVinci, mais cela représente également une de ses forces en termes de fiabilité.
Montage
DaVinci est capable de travailler nativement avec la majorité des médias actuels, qu’ils soient enregistrés sous des formats fortement compressés, comme les images issues des smartphones (H.264 et dérivés), ou des formats Raw que le logiciel sait très bien traiter. Sans nécessiter une puissance monstrueuse, il reste conseillé d’exploiter un ordinateur suffisamment dimensionné et récent, surtout si on souhaite bénéficier des fonctions les plus évoluées. De nombreux outils bénéficient de l’accélération GPU (graphic power unit), l’acquisition d’une bonne carte graphique est bénéfique et conseillée pour les adeptes des VFX. Les médias sont gérés dans la page éponyme, où il est possible de créer des chutiers (dossiers), de synchroniser des éléments audio et vidéo captés séparément ou de préparer des plans multi-caméras. L’outil clone permet de vérifier la copie des cartes mémoires sur un ou plusieurs disques durs ou autres espaces de stockage.
Dans la page montage, on bénéficie d’outils traditionnels synthétisant le meilleur des solutions de montage virtuel du marché. Les monteurs auront plaisir à retrouver les points forts des logiciels qu’ils utilisent habituellement (Avid Media Composer, Apple Final Cut Pro, Adobe Premiere Pro). L’interface propose des options de personnalisation limitées dans le placement des fenêtres comparativement à certains concurrents, le parti pris ayant été d’optimiser l’efficacité. De plus, avec DaVinci, il n’est pas nécessaire de préparer des espaces de travail dédiés aux effets, à l’étalonnage et au mixage, des pages spécialisées sont accessibles en bas de l’interface générale du logiciel. Disponibles via une bibliothèque dédiée, les effets sont modifiables depuis l’inspecteur ou dans la timeline via une représentation graphique des paramètres à manipuler, modification de la vitesse incluse.
Cut : une autre « page » dédiée au montage !
On se demandait comment Blackmagic pouvait encore s’amuser à nous surprendre ! Ce n’est certainement pas le seul but de la page Cut, un outil dédié au montage rapide. C’est également une boîte à idées où des fonctionnalités novatrices et des concepts issus du passé et adaptés aux nouvelles technologies se côtoient. Grâce à la double timeline, vous bénéficiez simultanément d’une vue rapprochée des clips sur lesquels vous travaillez et d’une vue de la globalité du montage. La fonction source tape propose de revenir à l’époque du montage multi-machines. Un magnétoscope enregistreur recueillait les images d’une bande source sur laquelle les images étaient enregistrées plan après plan.
On a énormément gagné en flexibilité avec le montage virtuel, mais la disponibilité de l’ensemble des rushes présentés dans l’ordre de tournage était parfois avantageux, notamment pour les montages demandant une grande rapidité, tels ceux de sujets d’actualité. C’est la version moderne du concept que proposent les développeurs de Blackmagic Design ! Ici tout est orienté efficacité, depuis l’application des effets directement depuis le visualiseur, le nouvel outil dédié au trimming (amélioration des transitions) ou le choix des formats de timeline accessibles via une simple icône. On peut même, lors du dérushage, prévisualiser rapidement l’ensemble de ses clips, la vitesse de lecture étant adaptée à la taille de chacun des plans. Une fonction également très maligne !
Frame.io
Cette solution externe à Blackmagic (https://frame.io) est nativement intégrée à la version studio de DaVinci 16. C’est un outil facilitateur de collaboration entre les équipes de production, grâce à des fonctions de validation en ligne et des annotations des travaux vidéo en cours de production.
Étalonnage
On en oublierait aujourd’hui presque que c’est le cœur de DaVinci Resolve ! Que vous soyez étalonneur professionnel, monteur ou vidéaste, l’outil vous offre toutes les fonctionnalités pour travailler la colorimétrie de vos films. Des outils d’étalonnage automatique sont basés sur le deep learning et l’intelligence artificielle. Ils sont la porte d’entrée pour bénéficier de la puissance de l’outil avec un minimum de connaissance.
Lorsque l’on souhaite s’aventurer dans l’exploration des fonctionnalités plus évoluées, plusieurs méthodes s’ouvrent aux utilisateurs selon leurs habitudes. Les photographes et autres addicts d’Adobe Photoshop apprécieront les onze fonctions (température, teinte, contraste, saturation, détails des tons intermédiaires, etc.) et les courbes sur lesquelles sont superposés les histogrammes des vidéos bénéficiant d’une nouvelle accélération GPU. Prévu pour les besoins des étalonnages films ou documentaires, Resolve propose de nombreuses options de sauvegardes des étalonnages, et de copies simplifiées de « grades » de clip à clip offrant un gain de temps très appréciable. Pour travailler dans des zones spécifiques de l’image, vous pouvez mettre à profit la construction nodale, les sélecteurs de plage de couleur et les power windows (formes). Pour une configuration d’étalonnage professionnelle, quelques aménagements s’avèrent indispensables. Deux écrans permettent l’affichage simultané des outils d’analyse de l’image (oscilloscopes, vecteurscopes, parade), sans se superposer à d’autres éléments de l’interface. Un écran correctement calibré est indispensable au travail d’un étalonneur ; pour le connecter à la station, une carte ou un boîtier de sortie vidéo Blackmagic est nécessaire.
Fusion : ou comment connecter des nœuds avec des nouilles
De nombreuses passes d’import/export sont souvent nécessaires pour des effets spéciaux et du motion design plus ambitieux, comparativement aux fonctionnalités disponibles dans les outils de montage. Dans DaVinci, il suffit de changer d’interface pour qu’un plan monté soit prêt à être truqué dans Fusion. On retrouve la conception nodale exploitée dans la section étalonnage. Cette méthode de travail est appréciée de nombreux professionnels pour sa représentation didactique et simplifiée du travail sur les médias. Là où d’autres outils utilisent des calques dont les paramètres et les effets sont animés le long d’une timeline, dans Fusion, les médias, les outils, les effets et les sorties sont matérialisés par des nodes : sortes de boîtes avec des connexions (entrées, sorties, masques) reliées entre elles par des connexions appelées noodles. En français on dirait : on connecte les nœuds avec des nouilles !
Avant d’être intégré à DaVinci, Fusion (à l’origine Digital Fusion) était un logiciel indépendant créé par la société australienne Eyon, rachetée par Blackmagic. Une version indépendante du logiciel est aujourd’hui encore disponible. Avec Fusion, vous pouvez effectuer des opérations d’effets spéciaux, telles que les traditionnelles incrustations sur fond vert ou bleu, les titrages et animations complexes. Vous disposez de fonctions de suivi par points et planaires et de suivi caméra 3D (version studio). Un générateur de particules et des outils de modélisation en 3D véritable (extrusion, lumières, matières) complètent ces impressionnantes fonctionnalités.
Fairlight
Tout le soin apporté à vos images valait bien un superbe logiciel dédié au son. C’est une autre société originaire d’Australie qui est à l’origine de la station de travail audio Fairlight. Le Fairlight CMI fût en 1979 une des premières stations de travail musical utilisée par Peter Gabriel ou Jean-Michel-Jarre. L’intégration de l’outil au cœur de DaVinci Resolve est aujourd’hui arrivée à maturité. On peut ajouter des effets sur les clips ou sur les pistes audio et des corrections fréquentielles paramétriques ainsi que des traitements de la dynamique. L’enregistrement des voix off bénéficie d’un outil dédié : l’ADR (automatic dialog replacement). Parmi les nouveautés impressionnantes : il est possible de jouer sur la vitesse de certaines plages audio (musiques, bruitages ou dialogues) via des images clés, le timbre étant conservé ! Ce n’est qu’un aperçu des fonctionnalités professionnelles, avec des outils d’analyse du loudness, une tête de lecture centrale fixe dans la timeline ou encore des automations accessibles pour tous les paramètres (niveaux, effets). Le prix de cette solution est très peu représentatif de sa qualité et de sa puissance. Si vous cherchiez une solution pour vos premiers montages ou une alternative à des solutions onéreuses ou qui ne vous conviennent plus, nous vous conseillons d’étudier de près DaVinci Resolve.
Comme vous l’aurez compris, le professionnalisme de l’outil n’est plus à démontrer, et il est conseillé de se former correctement pour en tirer la substantifique moelle. Blackmagic a mis en place un programme de formations certifiantes. Des ouvrages pédagogiques sont disponibles gratuitement (en .pdf) sur le site de Blackmagic ; des formateurs certifiés peuvent vous accompagner.
Nous remercions chaleureusement Cléo Productions et Stéphanie Vasseur la réalisatrice du court-métrage Chercher son nid pour nous avoir permis d’utiliser leurs images.
Extrait de l’article paru pour la première fois dans Moovee #1, p.48/53. Abonnez-vous à Moovee (6 numéros/an) pour accéder, dès leur sortie, à nos articles dans leur intégralité.
Lire aussi : “DaVinci Resolve 16 nous donne le choix des armes. Comment choisir où monter avec DaVinci Resolve 16 ? Dans la page Montage ou la page Cut ?”