InVID, une boîte à outils pour détecter les fausses vidéos

Avec des contenus centrés sur l’actualité, les réseaux sociaux deviennent des canaux alternatifs d’information. La multiplicité des sources et leur relatif anonymat ouvrent malheureusement la voie à toutes les dérives. Pour diffuser ces contenus, les médias d’information traditionnels doivent en vérifier l’authenticité. Le projet de recherches InVID leur offre de nouveaux outils de recoupement et d’analyse, pour les assister dans cette tâche.*
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Les réseaux sociaux sont devenus des sources alternatives de photos ou de vidéos pour les agences de presse, les journaux ou les chaînes d’infos. S’ils démultiplient les canaux d’information et offrent une couverture élargie des événements, la grande faiblesse de ces UGC (User Generated Content) reste l’absence d’authentification des sources et le doute sur la crédibilité de leurs auteurs. D’autant qu’avec les outils de montage et de traitement des images, il est aisé de travestir la vérité pour propager des rumeurs et contre-vérités.

InVID est un projet de recherche soutenu par l’Europe dans le cadre du programme d’innovation H2020. Il a pour objectif de créer les outils nécessaires à la détection des informations contextuelles, de leur recoupement avec d’autres sources et de leurs éventuels truquages. Le consortium à l’origine du projet regroupe à la fois des universités, des centres de recherche, des spécialistes du traitement d’image, associés à deux organes d’information, l’Agence France Presse et Deutsche Welle, l’équivalent allemand de France 24.

 

Des extensions pour navigateurs web

Ces outils de vérification et de détection d’éventuelles manipulations sont avant tout destinés à des journalistes. Leur accessibilité et leur ergonomie sont donc primordiales pour ne pas ralentir la course de vitesse devenue incontournable entre tous les médias.

L’un des premiers outils créés par le consortium InVID est un jeu d’extensions pour les navigateurs Chrome et Firefox. Dès la copie de l’URL d’une vidéo YouTube ou Facebook, ils affichent les métadonnées du fichier avec, entre autres, la date de mise en ligne qui, si elle est antérieure à l’événement, laissera planer un sérieux doute sur son authenticité. Ils découpent aussi la séquence en « key frames » pour servir de requêtes sur les principaux moteurs de recherche d’images, Google et Yandex ou sur Twitter. Des images similaires couvrant un autre événement ou des copies du même film avec une description différente éveilleront l’attention.

Un outil dédié à Twitter permet d’affiner les recherches sur le site de microblogging. Un outil loupe facilite la lecture de détail dans une image. Un autre module sert à pointer sur Google Maps les lieux de prises de vues quand les données de localisation ont été enregistrées. Enfin, le dernier module donne accès à l’outil d’analyse d’image développé par le CERTH de l’ITI d’Hellas en Grèce et Deutsche Welle. Grâce à ses algorithmes internes, il détecte dans une image les éléments ajoutés, modifiés ou manipulés. À partir de tous ces éléments, le journaliste pourra valider ou, au contraire, mettre en doute la véracité d’une séquence trouvée sur Internet.

 

D’autres outils pour étendre l’analyse de la vidéo

D’autres outils d’analyse sont en cours de développement à différentes phases d’élaboration. L’ITI a développé un service en ligne d’analyse de contenu, Video Analysis 4 All. Après avoir découpé le contenu en plans vidéo, chacun est analysé et les éléments de l’image sont listés (homme, ciel, voiture, oiseaux, etc.) avec leurs coefficients de présence. Une présentation multicritère croisée sert à naviguer dans le document en fonction de l’élément recherché. Il présente le film avec un classement par éléments sous forme d’imagettes. Un autre outil logiciel sert à la détection automatique de logos avec un lien vers une base de données des chaînes et médias audiovisuels, étendu petit à petit aux groupes, associations et autres organismes mettant en ligne des contenus, pour d’un clic aller chercher sur le web les informations les concernant.

Un autre service est destiné à l’analyse et à la gestion des droits de diffusion et faciliter le travail du journaliste pour respecter les droits des auteurs du document. À partir des métadonnées du document, les droits de diffusion associés aux règles du site vidéo sont affichés avec des propositions sur les conditions de reprise du contenu selon le réseau exploité, là aussi avec constitution d’une base de données des détenteurs de contenus (s’ils acceptent d’y participer) facilitant ainsi la mise en relation entre auteurs et diffuseurs.

Une partie de ces outils peuvent être consultés en ligne ou téléchargés depuis le site du projet InVID et celui du MediaLab de l’AFP.

 

* Article paru pour la première fois dans Mediakwest #23, p.94Abonnez-vous à Mediakwest (5 nos/an + 1 Hors série « Guide du tournage) pour accéder, dès leur sortie, à nos articles dans leur totalité.