De nouveaux arrivants sur le Sunny Side of the Doc 2022

Première édition en présentiel depuis la crise du Covid, les habitués de l’espace Encan ont fait leur retour cet été sur l’événement consacré au documentaire international. Dans les couloirs de l’édifice, nous avons fait la connaissance de trois nouveaux venus à La Rochelle.
Un Sunny Side 2022 de retour en présentiel à l’espace Encan de La Rochelle. © DR

 

Ensoleillé et plaisant, comme toujours, l’édition 2022 du Sunny Side a recensé assurément encore plus de sourires qu’à l’accoutumée. Il faut dire qu’après deux années en virtuel il était bon de retrouver dans un univers réel le petit monde du documentaires (auteurs, réalisateurs, producteurs, diffuseurs…). Les coutumiers du rendez-vous, CNC, syndicats, chaînes de télévisions, sociétés de productions, distributeurs ou encore archives patrimoniales ont été rejoints cette année par quelques nouveaux occupants sur les stands des exposants.

Aux côtés de l’INA, de Pathé Gaumont, du CNRS et de bien d’autres représentants de la corporation des exploitants d’archives présents chaque année, M6 Video Bank exposait ses services pour la première fois. Si l’on ne présente plus le groupe M6 qui était, jusqu’il y a peu, sous le feu de l’actualité grâce à la tentative de fusion avec le groupe TF1, son service de commercialisation des archives est lui beaucoup plus méconnu, pourtant il ne manque pas de matière.

 

Archives anciennes et récentes

Le service dédié M6 Video Bank n’emploie que quatre personnes à temps plein. « Le groupe, via chacun de ses canaux de diffusion, dispose de nombreuses archives depuis sa création. Mais ce qui nous intéresse également de mettre en avant par l’intermédiaire de notre présence à La Rochelle, c’est aussi la possibilité d’exploiter des extraits de programmes récents », explique Mathilde Durand, en charge de la commercialisation des images de M6 Video Bank. Il semble effectivement que, même dans l’univers du documentaire plus aisément associé à l’archive ancienne, l’évolution des demandes des réalisateurs a tendance à faire baisser l’âge moyen des extraits utilisés.

Le fond audio des radios du groupe RTL (maison mère des chaînes du groupe M6) poursuit sa numérisation. Les plus lointaines remontent à 1933. En ce qui concerne les nombreuses heures de programmes vidéo, beaucoup d’entre elles, encore conservées sur des formats cassettes, sont également en cours de digitalisation. « Les émissions à forte notoriété sont clairement identifiées comme des marques. Ce sont probablement elles qui se vendent le mieux. On peut citer notamment Fréquence Star ou encore Hit Machine qui font partie des références », précise Mathilde Durant.

 

Pour la première fois, M6 Video Bank disposait d’un stand à proximité des autres sociétés d’exploitation d’archives. © DR

Créée en 2016, la filiale patrimoine de M6 est implantée au siège historique du groupe à Neuilly-sur-Seine. Chaque jour ce sont plus de 20 000 vidéos de tous formats qui sont archivées. L’ensemble est accessible sur la plate-forme www.m6videobank.com. Les professionnels peuvent y créer un compte pour effectuer leurs recherches. L’équipe interne est également disponible pour répondre aux demandes des programmes non encore numérisés et donc pas encore accessibles sur le site. Comme à l’accoutumée dans le secteur, les tarifs dépendent de la durée de l’extrait (par tranche de 30 secondes ici) et du type d’exploitation envisagé.

 

Le podcast audio fait son entrée

Le Sunny Side of the Doc est légitiment associé au documentaire filmé. Pourtant, compte tenu de l’essor du podcast des nouvelles écritures et de la diversité des formats qu’il permet, il aurait été surprenant de ne pas voir les œuvres audio prendre également possession de l’événement. C’est chose faite en cette édition 2022 par l’intermédiaire de présentations de plates-formes de diffusion et de monétisation dédiées à l’occasion des tables rondes. Ça l’est aussi grâce à la présence d’un jeune syndicat des producteurs audio indépendants.

Créé fin janvier 2020, le PIA rassemble vingt-quatre professionnels du podcast. « Il y a aujourd’hui une véritable économie du podcast. Les sociétés, que ce soit les producteurs ou les prestataires techniques, sont rentables. Il est important pour nous d’aider le secteur à se structurer et de l’accompagner dans sa croissance et son organisation », clarifie Joël Ronez, président du PIA et fondateur de Binge Audio.

Selon les chiffres exposés sur le stand du syndicat, il semblerait que parmi les adhérents dix entreprises dépassent le million d’euros de chiffre d’affaires, tandis que dix autres atteignent les 500 000 euros. Les auteurs de podcast, dont une partie signent des documentaires et non de « simples » entretiens, sont pour beaucoup d’entre eux originaires de l’audiovisuel ou de la presse écrite.

L’une des actions portées par le PIA porte sur le développement de l’aide à la création encore balbutiante dans le domaine. Le PIA a rappelé qu’il est actif et demeure un partenaire essentiel dans la structuration de l’écosystème numérique et qu’il promeut un cadre réglementaire, juridique et contractuel respectueux des ayants-droit, et favorable à la création française. Il rappelle sa détermination à obtenir des pouvoirs publics la mise en œuvre d’aides à la création, sous forme d’aides aux projets ou de crédits d’impôt.

Le financement actuel provient essentiellement des plates-formes de diffusion et du sponsoring privé. Il est vrai qu’on a du mal à ne pas envisager la mise en place de soutiens numéraires plus institutionnalisés qui viendraient en complément des subsides privés (fonds de soutien, crédits d’impôts…). Le travail de création et la qualité de réalisation de certaines œuvres, qui malgré des sujets parfois pointus trouvent leur public, le méritent.

L’âge moyen des auditeurs de podcast est assurément plus jeune que celui de la radio traditionnelle, avec un public qui se situe majoritairement entre 25 et 35 ans. « Nous avons de nouveaux savoir-faire éditoriaux mais aussi techniques à mettre en valeur. On assiste également à une pluralité des écritures mais aussi à de plus en plus d’adaptations. Il est aujourd’hui assez fréquent de voir des programmes vidéo adaptés en podcast et inversement », ajoute un membre du syndicat.

Le podcast a effectivement ceci d’intéressant qu’il peut être exploité seul ou au contraire venir en complément d’un autre programme diffusé sur d’autres types de médias (presse écrite ou vidéo). Bref, il s’agit sans conteste d’une source d’inspiration supplémentaire pour le documentaire.

 

Giusse Dembault-Lalois, coprésidente de la Fédération des Jeunes Producteurs Indépendants et productrice au sein de la SCOP BKE. © DR

De jeunes professionnels en quête de réseaux

À l’occasion du Sunny Side, les syndicats et fédérations « historiques » (SPI, Satev…) dressent chaque année un bilan de leurs actions en cours. L’objectif est de communiquer à leurs adhérents et à la presse spécialisée des avancées (ou reculs) de la profession en matière d’accords avec les partenaires sociaux, les fonds d’aides ou encore les diffuseurs.

Pour la première fois dans l’espace, Encan accueillait sur ses stands la Fédération des Jeunes Producteurs Indépendants. « Nous ne sommes pas un syndicat, mais avons pour mission de mettre des outils à disposition de jeunes producteurs commençant depuis peu dans la profession », avertit Giusse Dembault-Lalois coprésidente de l’association et productrice au sein de la SCOP BKE.

Sur le marché du documentaire, la FJPI met en réseau les jeunes sociétés de production avec les acteurs incontournables du documentaire, de la télévision et du Web. Au travers de rencontres professionnelles, elle leur permet aussi de développer tout au long de l’année des relations avec des financeurs (chaînes de télévision, plates-formes…) des institutions, des auteurs, des prestataires techniques et des producteurs. La FJPI, association loi 1901, représente aujourd’hui plus de cent sociétés de production développant des contenus de tous genres et de tous formats. Elle a pour ambition de favoriser la diversité de la création et l’innovation. L’organisme organise également des ateliers d’aide à l’insertion professionnelle.

Pour la co-présidente, son rôle au sein de la fédération et son action professionnelle vont de pair : « En tant que productrice, je me sens très proche de l’état d’esprit de la fédération puisque je souhaite faire émerger une nouvelle narration portée par une nouvelle génération qui ne doit pas avoir peur d’explorer une autre vision du monde. »

 

Un peu de fraîcheur durant l’été

Les trois nouveaux venus sur le Sunny Side of the Doc 2022 ont un point commun, celui de la jeunesse et d’une forme de renouveau. Des archives de plus en plus immédiates, un mode de consommation du documentaire audio qui prend de l’ampleur grâce au podcast ou encore une fédération de producteurs en cours de réseautage. Tout cela est plutôt de bon augure pour un secteur qui, à l’instar des autres branches de l’audiovisuel, est voué à une permanente mutation. Il faudra aussi retenir que le Sunny Side, qui s’est déroulé en juin, était le premier en présentiel à se tenir sans son fondateur, Yves Jeanneau. Ce dernier nous a quittés il y a bientôt deux ans. Avec sa longue expérience dans le milieu, Yves aurait sans doute été heureux de voir arriver du sang neuf.

 

Article paru pour la première fois dans Mediakwest #49, p. 142-144