Workflow de l’extrême: cas d’étude en haute montagne

Tous les hivers, les meilleurs skieurs et snowboardeurs de la planète se défient sur les faces escarpées du Swatch Freeride World Tour by The North Face. La compétition, qui rassemble une soixantaine d’athlètes, se déroule sur six étapes dans les domaines les plus mythiques : Chamonix, Courmayeur, Revelstoke, Haines... Avec, comme finale, l’XTreme de Verbier, qui fêtera cette année ses vingt ans. Le principe est simple : une porte de départ au sommet d’une montagne, une arrivée et, entre les deux, une face vierge sur laquelle les riders choisissent leur ligne pour convaincre le jury, en enchaînant couloirs raides, sauts de barres ou figures...
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Les courses sont retransmises en live sur Dailymotion et RedBull TV, et donnent en plus lieu à diverses productions vidéos destinées à la télévision ou au web : newscuts, 26’, 52’, highlights, runs, journaux… En tout, une équipe d’une quarantaine de personnes, menée par David Arnaud, le directeur de production : « le principe c’est que la production s’adapte au sport et non l’inverse ! Il faut donc une flexibilité maximale en termes humains et matériels pour pouvoir déployer un webcast en moins de 36 heures sur une montagne, sans aucune infrastructure préexistante. »

 

En effet, les contraintes de course étant fortement liées aux conditions d’enneigement, de stabilité du manteau neigeux et à la météo, la date et le lieu de l’événement sont connus moins de deux jours à l’avance, ce qui implique une bonne réactivité de l’équipe. La régie est montée en hélicoptère la veille et installée sous une tente chauffée à 6-7 degrés pour que le matériel puisse fonctionner correctement et que les techniciens supportent plusieurs heures assis dans le froid. Le responsable technique, Steeve Morales, a fait le choix d’une infrastructure BlackMagic Design autour du mélangeur ATEM 2 M/E qui récupère les signaux des caméras réparties sur la montagne, en fibre pour les plus proches et en HF pour les plus éloignées.

 

De la cineflex à l’arrivée, en passant par les points stratégiques de la face, une quinzaine de cadreurs filment la course avec différentes caméras : EX3, FS700, Phantom… et les riders sont équipés de GoPro pour le point de vue immersif. En tout, une quarantaine d’heures de rushes est produite pour chaque étape, ce qui représente 1,5 To de données.

 

Les monteurs doivent donc gérer un stock important d’images de différents codecs et dans un laps de temps très court, les 48 heures suivant la course étant capitales pour fournir les principaux montages ! Afin d’améliorer cette productivité, Aurélie Monod, monteuse et formatrice, a mis en place un workflow collaboratif autour d’un stockage centralisé et des logiciels Adobe Creative Cloud : « David Arnaud choisit son équipe en fonction de leur sensibilité artistique, de leur connaissance de ce sport très pointu et de leur aisance en montagne, non de leur connaissance de tel ou tel logiciel. Tous viennent d’Avid, Final Cut Pro ou Edius, montent sur des plateformes Mac ou PC… Il fallait donc un logiciel vers lequel la migration soit aisée et qui réponde à nos exigences d’efficacité, donc le choix de Premiere Pro s’est imposé naturellement. » Le logiciel étant capable de traiter en natif la majorité des formats, aucun transcodage n’a été nécessaire, un gain de temps et d’espace disque non négligeable.

 

Pour le stockage centralisé, il a fallu trouver un serveur de médias qui puisse être transporté à ski, donc secoué, et qui accepte de fonctionner dans des conditions de température et d’humidité assez extrêmes. C’est le Titanium-Z de Small Tree qui a été sélectionné, sur lequel huit monteurs peuvent accéder simultanément aux rushes avec un débit de 100 Mbit/s.

 

Le live est capturé directement sur le serveur grâce à des mini-converter Black Magic reliés en sortie du mélangeur, de sorte à ce qu’un résumé de la compétition puisse être monté pendant le déroulement de celle-ci et sonorisé par les commentateurs dès la fin de la course.

 

Ensuite toute l’équipe rejoint la station à skis, avec le serveur sur le dos, pour faire l’ingest des cartes des différentes caméras grâce à Prelude. Commence alors un vrai travail collaboratif car tous les monteurs se mettent au dérushage, en créant des séquences que peuvent venir chercher leurs collègues dans leurs projets, pour bénéficier d’un réel travail d’équipe. Pour Aurélie Monod « travailler ainsi tous ensemble est vraiment un gain de temps et un enrichissement, même si à la fin chacun signe son edit ». Chaque monteur utilise des modèles de séquences, avec mapping audio et presets d’export, pour que la technique soit la moins présente possible et que chacun puisse se concentrer sur l’histoire à raconter. Sur une timeline se mêlent différents codecs, diverses cadences, des images progressives ou entrelacées en toute transparence pour le monteur.

 

Ce travail collaboratif a donc permis de renforcer l’esprit d’équipe et de gagner en productivité, pour une programmation améliorée. Pour David Arnaud, « cela s’est ressenti sur le moral et la meilleure santé de mes équipes, ce qui est primordial pour enchaîner ces événements en conditions extrêmes ! »


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